Suite des articles sur Resilience et education

Résilience via le magazine Innovation Pédagogique

Ayant entendu et apprécié la conférence d'Oliver Hamant lors des rencontres co-construire à Tournai en juillet, je me fais l'écho ici de ses propos sur la robustesse versus la performance à travers cette interview publiée le 6 septembre 2023 dans GoodPlanet'mag.

Et si la robustesse était enseignée dans les écoles et universités ?

Graphic recording - Innerfrog ; dessin réalisé lors de la conférence d'olivier Hmant à Co-construire 2023

Le scientifique Olivier Hamant : « notre performance humaine a un coût environnemental exorbitant »

Un article que le magazine GoodPlanet'mag autorise à republier dans un usage non lucratif en citant la source

Le biologiste Olivier Hamant vient de publier fin août 2023 Antidote au culte de la performance. La robustesse du vivant dans la collection Tract chez Galimard. Ce directeur de recherches à l'INRAE, spécialiste des plantes et la biologie moléculaire et cellulaire, critique la notion de performance. L'idée et la recherche de la performance se montrent omniprésentes dans la pensée et l'action humaine, alors que, selon lui, le vivant mise plutôt sur la robustesse. Au-delà du champ des recherches scientifiques, ses travaux conduisent à plusieurs réflexions sur la manière dont les sociétés humaines peuvent et doivent faire face aux défis environnementaux. Il les a aussi développés dans La Troisième voie du vivant en 2022 chez Odile Jacob. Olivier Hamant a accepté de répondre par écrit à quelques questions posées par GoodPlanet Mag' autour de la robustesse et de la performance.

Comme biologiste, pourquoi distinguer la performance de la robustesse ? Qu'est-ce que cela implique ?

La performance, c'est la somme de l'efficacité, c'est-à-dire atteindre son objectif et de l'efficience, ce qui signifie avec le moins de moyen possible. La performance ouvre la voie de l'optimisation et de la compétition. Dans un monde stable et abondant en ressources, cette performance peut faire sens. C'est d'ailleurs ce qu'on observe chez certains parasites ou dans les blooms algaires par exemple.

« La robustesse permet la viabilité dans un monde instable et en pénurie de ressources. »

La robustesse, elle, maintient le système stable malgré les fluctuations. La robustesse permet la viabilité dans un monde instable et en pénurie de ressources. On la trouve d'ailleurs dans la plupart des écosystèmes terrestres, précisément parce qu'ils ont un ou plusieurs facteurs limitants. La robustesse ajoute des marges de manœuvre, stimule la coopération et explore des voies alternatives pour pouvoir faire face aux imprévus. La robustesse se construit donc contre l'efficacité et l'efficience. Elle est la réponse opérationnelle dans un monde turbulent.

Pour quelles raisons dénoncez-vous la contre productivité de la recherche effrénée de la performance ?

Nous sommes attirés par la performance, notamment parce qu'elle donne le sentiment de progrès, voire même, du devoir accompli. Or, les gains d'efficience (énergétique notamment) conduisent en général à des effets rebond qui, à terme, aboutissent à de plus grandes dépenses énergétiques. Pensez au SUV électrique par exemple.

« La robustesse se construit donc contre l'efficacité et l'efficience. »

Par ailleurs, quand on veut absolument performer, on fera tout pour y parvenir. Dans le sport, ça donne le dopage, les paris financiers, la triche, etc. À partir d'un certain niveau de performance, on oublie pourquoi on performe jusqu'à se blesser quand on est sportif ! Enfin, notre performance humaine a un coût environnemental exorbitant : plus nous performons, et plus la biodiversité s'effondre, le climat se dérègle, les ressources se raréfient, les pollutions se généralisent. Nous sommes dans l'ère de la performance contreproductive. Il n'y a plus trop de doute sur ce point.

(À lire aussi Aurélien Bigo : « les capacités des voitures thermiques ou électriques sont surdimensionnées par rapport aux usages réels »)

De façon générale, la performance ne bénéficie-t-elle pas du fait qu'elle se mesure avec des outils et une métrique facile à comprendre alors que la robustesse, que vous appelez de vos vœux, requiert une approche plus complexe ? Comment évaluer la robustesse et prouver sa pertinence ?

Une force de la performance est en effet sa simplicité. Mais c'est aussi son principal défaut : elle pousse à voir le monde comme un ensemble de petits problèmes à résoudre successivement. Or, quand on lutte contre le dérèglement climatique avec des batteries au lithium ou de l'énergie nucléaire, on crée surtout d'autres problèmes ailleurs. De prime abord, la robustesse peut en effet paraître plus complexe. Cependant au fond, il s'agit de considérer que le monde est fluctuant et le sera toujours plus, en tout cas dans le siècle qui vient.

« La performance est surtout court-termiste. »

Plutôt que d'augmenter la performance aveuglément, il faudrait plutôt faire des tests de robustesse, comme envisager une sécheresse, une augmentation du coût de l'énergie, une grève, des émeutes urbaines, etc. Si la solution envisagée ne tient pas la route avec ces fluctuations, alors elle n'est pas robuste. Pour rectifier le tir, on essaiera plutôt de diversifier les savoir-faire, multiplier les liens au territoire (les ressources locales matérielles et humaines), ou garantir la transmission sur le temps long. C'est finalement aussi simple que la performance. On se pose juste d'autres questions, nettement plus pertinentes dans un monde turbulent.

photo Michel Briand , Olivier Hamant lors de sa confrénce à co-construire

Comment remettre en cause la performance au profit de la robustes alors que la plupart des politiques environnementales misent avant tout sur la performance ? Est-ce d'ailleurs pour cela que vous distinguez l'adaptation de l'adaptabilité face aux dérèglements climatiques ?

Les solutions performantes sont souvent paresseuses. Elles n'envisagent pas de ruptures brutales, par exemple un méga-feu dans la région ou de soudaines tensions géopolitiques liées aux terres rares. La performance est surtout court-termiste. Et arrogante : quand on dit qu'on va s'adapter, on prétend savoir de quoi l'avenir sera fait. Or, le GIEC comme les autres consortia internationaux convergent pour dire que le monde va devenir de plus en plus incertain. Il ne faut donc pas s'adapter ; il faut être adaptable. Ce sont deux voies contraires : quand on s'adapte, on (im)mobilise beaucoup d'argent, de temps, et de personnes dans une voie étroite.

« La robustesse que je défends est bien une solution fondée sur la nature. C'est même pour moi la première leçon à apprendre des êtres vivants : ils sont robustes parce qu'ils ne sont ni efficaces (pas d'objectif) ni efficients (ils gâchent beaucoup). »

Quand on est adaptable, on multiplie les options sans savoir laquelle sera la bonne. Les politiques environnementales devraient acter que dans un monde turbulent, on ne prévoit plus, on se prépare. On bascule donc de la performance à la robustesse. Dit autrement, il ne s'agit plus d'éviter les fluctuations, il faut construire un modèle économique sur les fluctuations.

(À lire aussi Les collapsologues Pablo Servigne et Raphaël Stevens : « c'est un sevrage très dur qui nous attend car tout le monde est drogué aux énergies fossiles »)

Vous battez en brèche l'idée d'efficacité au sein de la Nature, est-ce aussi une critique adressée aux approches biomimétiques et aux Solutions fondées sur la Nature qui sont souvent présentées sous le prisme de la Nature sait faire de manière plus efficace que l'humain et ses technologies ?

La robustesse que je défends est bien une solution fondée sur la nature. C'est même pour moi la première leçon à apprendre des êtres vivants : ils sont robustes parce qu'ils ne sont ni efficaces (pas d'objectif) ni efficients (ils gâchent beaucoup). Ce que je critique, c'est plutôt une partie du biomimétisme qui extrait des performances du vivant pour « augmenter » les solutions techniques humaines. Dans ce cas-là, on fait plutôt l'inverse d'une solution fondée sur la nature : on plaque la technique humaine sur le vivant, en le réduisant à une machine. Mais, heureusement, le biomimétisme est en profonde mutation actuellement, et cela aboutit à un regard nettement plus équilibré sur le vivant, et une réelle inspiration pour la société.

(À lire aussi Les solutions fondées sur la nature principalement déployées en Europe pour le moment)

Vous écrivez que la difficulté n'est plus de trouver les solutions et que celles-ci existent et sont nombreuses, mais de bien les choisir. Que voulez-vous dire par là ?

Prenez l'agroécologie et les éoliennes géantes. Les deux entrent dans le champ du développement durable. Or, l'une se montre robuste (l'agroécologie) et l'autre s'avère juste performante (les éoliennes géantes).

(À lire aussi Bertrand Piccard et la fondation Solar Impulse ont identifié plus de 1000 solutions écologiques : « il faut de nouvelles technologies pour ne pas demander à la population des efforts impossibles à tenir »)

Dans un monde turbulent, les solutions performantes sont fragiles. Par exemple, les éoliennes géantes de 260 mètres de haut sont impossibles à recycler ou à réparer. Leurs pales, en composite, dépendent du balsa importé des forêts équatoriales et l'aimant de 7 tonnes est bourré de métaux rares. C'est très performant à court terme, on voit pourtant bien qu'il n'y a de fortes dépendances extérieures et donc aucune durabilité dans ce modèle.

« Il ne faut donc pas s'adapter ; il faut être adaptable. »

Au contraire, l'agroécologie vise l'autonomie active du champ : les cultures doivent résister à la sécheresse et aux pathogènes, et les sols doivent maintenir leur hygrométrie et leur fertilité. Cela est permis par une hétérogénéité variétale, par des pratiques respectueuses de l'agrosystème, et par la coopération entre paysan. La robustesse est le premier filtre pour trier les solutions réellement durables des solutions encore enfermées dans le culte de la performance.

(À lire aussi Philippe Bihouix : « la vraie ville « smart », c'est celle qui repose avant tout sur l'intelligence de ses habitants »)

Notre culture et notre vie, y compris dans l'intime, contient une injonction permanente à la performance, quelles sont les moyens pour sortir de ce diktat ?

Pensez que le monde est d'abord turbulent ! Quand nous tombons dans le piège de la performance, c'est que nous faisons l'hypothèse d'un monde stable, en abondance de ressources et en paix. Cette hypothèse est fausse. Une fois considérées les fluctuations, on fait des choix différents : on diversifie ses activités, on se relie à ses voisins, on apprend de nouveaux savoirs, on ne s'épuise plus à la tâche, on respecte son corps… Bref, on vit mieux ! Il faudrait plutôt se demander : pourquoi tient-on tant à l'efficacité ?

Ne plus miser sur la performance, n'est-ce pas cesser de croire qu'on peut faire mieux ? et donc une forme de renoncement assez forte dans une certaine idée du progrès, qui en dépit des crises écologiques, sociales, éthiques et économiques, a réussi à subsister ?

Le progrès de l'humanité a en effet été réduit à des gains de performance. On arrive aujourd'hui au bout de cette logique. D'une part, parce que certains des plus grands progrès sociaux et techniques ne sont pas le fruit de la performance : ils sont en général le fruit du hasard, de l'errance ou encore de l'incohérence. D'autre part, parce que miser sur la performance, c'est détruire notre habitat terrestre, et c'est réduire nos capacités de transformation à une seule voie, celle de l'optimisation et donc de la fragilisation. Basculer vers la robustesse, ce n'est pas la fin du « mieux », c'est plutôt le début du « pluriel ». Quand on mise sur la robustesse, on innove toujours, mais surtout, on multiplie les options, on se pose la question de l'appropriation par les citoyens, on construit des alternatives. C'est nettement plus créatif, plus stimulant et plus durable. L'innovation réduite aux seuls gains de performance, franchement, c'est un peu dépassé.

Avez-vous un dernier mot ?

Se réconcilier avec la nature, via la robustesse, c'est aussi se réconcilier avec soi-même. La robustesse construite sur les fluctuations et contre la performance est non seulement une évidence pour quitter le monde du burn-out des humains et des écosystèmes, mais aussi une réponse pertinente à l'éco-anxiété. C'est une voie d'avenir pour la jeunesse qui « déserte » le monde de la performance pour atterrir dans le monde robuste, inspiré du vivant, où tout reste à inventer.

Propos recueillis par Julien Leprovost

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Pour aller plus loin

Antidote au culte de la performance. La robustesse du vivant,par Olivier Hamant, collection Tracts, Gallimard

La Troisième Voie du vivant, par Olivier Hamant, édition Odile Jacob

et aussi
Inversion : Naviguer à contre-courant dans un monde incertain, vidéos (3) du cours d'Olivier Hamant à l'école urbaine de Lyon (2023)
Intervention d'Olivier Hamant au sein du MSc "Strategy & Design for the Anthropocene" le 25 avril 2022.
Résilience des vivants, par Olivier Hamant, Cours public 2021, école urbaine de Lyon


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Un article repris du magazine The Conversation, une publication sous licence CC by nd

À mesure que des questions de société émergent et que de nouveaux défis s'imposent aux sciences et technologies, notre vocabulaire s'étoffe, s'adapte. Des termes qu'on croyait déjà bien connaître s'enrichissent de significations inédites, des mots récemment créés entrent dans le dictionnaire. D'où viennent-ils ? En quoi nous permettent-ils de bien saisir les nuances d'un monde qui se transforme ? De « validisme » à « silencier », de « bifurquer » à « dégenrer », les chercheurs de The Conversation s'arrêtent deux fois par mois sur l'un de ces néologismes pour nous aider à mieux les comprendre, et donc mieux participer au débat public.


Le terme « bifurquer » a été largement mobilisé ces derniers mois dans l'espace médiatique français, notamment lors de remises de diplômes de plusieurs grandes écoles d'ingénieurs et de commerce.

Pointant les « ravages » sur la société et la planète auxquels participeraient les technologies, de jeunes diplômés ont dit haut et fort leur refus de participer à un modèle économique capitaliste jugé responsable de l'urgence écologique en cours. Tirant un trait sur les opportunités d'emploi et de carrière dans l'agro-industrie auxquelles ouvre leur formation, certains sortants d'AgroParisTech ont ainsi déclaré :

« Ne perdons pas notre temps, ne laissons pas filer cette énergie qui bout quelque part en nous, désertons avant d'être coincés par des obligations financières. (…) Commencer une formation de paysan-boulanger, partir pour quelques mois de woofing, participer à un chantier sur une ZAD ou ailleurs, vous investir dans un atelier vélo autogéré (…), ça peut commencer comme ça, à vous de trouver vos manières de bifurquer ! »

À travers ces prises de parole, la bifurcation est devenue à la fois une réalité concrète, une expérience subjective vécue par des individus souhaitant s'écarter des « chemins déjà tracés » et une revendication militante, autrement dit un moyen de lutter pour la cause écologique défendue.




À lire aussi :
Crise écologique : ces élèves ingénieurs qui veulent transformer leur métier


L'intérêt des sciences humaines et sociales pour cette notion n'est cependant pas nouveau et a donné lieu à un foisonnement de recherches. Ainsi, Marc Bessin, Claire Bidart et Michel Grossetti définissent les bifurcations comme « des configurations dans lesquelles des événements contingents, des perturbations légères peuvent être la source de réorientations importantes dans les trajectoires individuelles ou les processus collectifs ».

Elles constituent dès lors des ruptures d'ordre familial, professionnel, religieux, ou encore conjugal, dans des parcours de vie jusqu'alors marqués en apparence par une forme de continuité subjectivement perçue ou de régularité statistique. L'expérience d'un divorce, d'un décès, d'une maladie ou encore d'un licenciement, souvent perçue comme un « accident de vie », peut impacter durablement les parcours et conduire à des transformations à la fois des comportements, mais également des situations sociales et professionnelles.

Ces bifurcations sont par définition pluridimensionnelles. Elles peuvent prendre des tournures très variées selon leurs temporalités, le nombre d'individus ou le type d'organisations concernées, la dimension sociale qui est l'objet de cette rupture. Elles se différencient aussi selon les événements déclencheurs, s'ils existent, ou encore la nature des trajectoires suite à la bifurcation.

Les bifurcations à l'œuvre du côté des diplômés des grandes écoles ne constituent pas un phénomène complètement nouveau. Certains itinéraires présentent en effet des similitudes avec les parcours de vie des militantes et militants engagés dans les luttes sociales et écologistes des années 1960 et 1970. La revendication du « retour à la terre » était ainsi un référent commun dans les trajectoires individuelles et collectives qui ont quitté le monde salarial pour une vie à la campagne, notamment dans le Larzac.

Toutefois, la diffusion et l'écho obtenus par les travaux sur la collapsologie, l'investissement politique d'entrepreneurs de cause reconnus issus du GIEC ou du think tank The Shift Project, l'expérience désormais très concrète des conséquences du changement climatique dans les pays occidentaux changent la donne. Il faut aussi compter avec les échecs de tentatives de transformation « de l'intérieur » menées au sein des entreprises, finalement confrontées aux exigences de rentabilité et de compétitivité.

Ainsi qu'ils l'ont exprimé au printemps dernier, les diplômés des écoles d'ingénieurs et de commerce n'appellent pas seulement à des bifurcations individuelles, mais également, et surtout, à une bifurcation majeure des organisations et des structures sociales, politiques et économiques afin de préserver l'habitabilité de la planète.

The Conversation

Antoine Bouzin est membre du Réseau Ingenium et de l'Observatoire des formations citoyennes.


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Du 31 mai au 4 juin 2023 à Poitiers, les Rencontres Internationales de la Classe Dehors ont pour intention de dresser un état des lieux des approches de la classe dehors, avec la coopération de nombreux acteurs associés au monde de l'enseignement.

Au sein de ces Rencontres, le Colloque international sur la Classe Dehors sera un espace privilégié de débats, de rencontres, de partage pour les chercheuses et chercheurs et l'ensemble des publics concernés. Il permettra de confronter divers contextes de classe dehors, en France et dans d'autres pays, reflétant différentes visions des politiques éducatives et leur inscription dans le champ social, sanitaire et environnemental.

Que ce soit dans les jardins d'Aristote, par l'étude des milieux, en classe promenade, en classe de mer, avec les clubs connaître et protéger la nature, en pédagogie sociale ou sur les terrains d'aventures dans l'éducation populaire, la classe dehors est une réalité protéiforme qui s'inscrit dans la longue histoire des méthodes d'apprentissages formels et informels.

Davantage reconnue par le ministère de l'Éducation nationale pour ses vertus sociales et pédagogiques depuis la crise de Covid-19, la classe dehors est bien implantée dans plusieurs pays et se développe rapidement dans l'espace francophone sous divers termes. La réflexion s'intègre aussi bien dans les classes primaires et secondaires qu'au sein de formations universitaires tout en intégrant la question de l'enfant dans l'espace public.

Ce colloque a pour vocation d'accueillir et de rassembler des contributions pouvant émaner de disciplines variées, de travaux interdisciplinaires et de récits d'expériences qui éclairent la classe dehors au plus près du terrain, là où des réalités collectives impliquent une pluralité de regards et de sensibilités. Les communications sont organisées selon trois grands axes pour mettre en lumière, analyser les expériences de terrain, en montrant les logiques de coopération, de partage et d'hybridation des savoirs et des pratiques que la classe dehors favorise.

Axe I : Apprendre dehors : état des lieux de la connaissance

Cette première thématique vise à faire connaître les travaux des chercheur∙es et des praticiens.nes qui étudient ou mènent des expériences d'apprentissage dehors et analysent les effets/réactions des enfants et des jeunes aussi bien dans l'éveil d'une conscience écologique que dans l'acquisition des savoirs fondamentaux et le
développement des compétences psychosociales.

Cet axe invite à s'interroger sur les pratiques et les postures des enseignant.e.s et accompagnateur.ice.s, sur l'articulation entre les séances de classe dedans et dehors, entre les disciplines et s'intéresse à l'évolution de la formation des enseignant.e.s et des cadres de l'éducation nationale pour répondre au développement de la pratique de la classe dehors.

Enfin, ces formes de pédagogies et d'apprentissage ne pouvant être considérées comme des solutions miracles adaptées à toutes situations ou contextes d'éducation, cet axe invite à une prise de recul critique sur le concept lui-même mais aussi plus particulièrement sur la capacité à reproduire des inégalités sociales et/ou
des discriminations de cette praxis.

Axe II : Territoire apprenant : forme scolaire, cohabitation avec les milieux et enjeux citoyens

Le territoire, en tant qu'espace vécu, dans ses fonctionnalités, ses temporalités, mais aussi dans le champ du symbolique et de l'imaginaire, devient accessible aux enfants par l'expérience régulière du dehors et la reconnexion avec la nature.

Cet axe invite à une interprétation nouvelle de l'espace et du temps et pose la question de la frontière de l'école dans et hors les murs. La forme scolaire, le bâti scolaire, les politiques des villes et l'aménagement du territoire sont traversés, renouvelés par ces pratiques du dehors, là où la notion de risque est plus que jamais présente. Le « territoire » de l'apprentissage dehors, est appréhendé au regard d'enjeux écologiques et citoyens de plus en plus prégnants. Cette seconde thématique s'intéresse également aux initiatives pédagogiques hors les murs qui permettent de recréer du lien (social, écologique, symbolique) à l'échelle du territoire.

Cet axe s'intéresse enfin aux démarches en cours sur les organisations et territoires apprenants, et lorsque des enfants y sont associés, sur le hors les murs des institutions

Axe III : La classe dehors au prisme des communs

Penser l'École « comme un commun », c'est admettre l'idée que les processus pédagogiques n'émanent pas d'une seule instance, mais que l'apprentissage est le fruit d'une communauté aussi bien que d'apprentissages, intégrant les enseignants∙e∙s, les élèves, les familles, mais aussi des associations, des collectifs, des élu∙e∙s et d'autres acteurs à différentes échelles territoriales. Cette
conception de l'éducation comme processus partagé conduit à renforcer la place des collectifs avec l'idée que les ressources pédagogiques qu'elles produisent/transforment soient aussi pensées comme des « communs », partageables et libres de droits, autour desquelles se fédèrent des communautés
plurielles.

Le cadre théorique et pratique que constituent les communs pédagogiques est donc au coeur de cet axe thématique. Les propositions devront permettre de préciser et de cadrer la notion de commun pédagogique tout en l'articulant avec la classe dehors. Elles pourront également porter sur des hypothèses méthodologiques permettant d'enrichir la notion de communs pédagogiques, afin de faciliter leur appréhension par les acteurs de l'éducation.

Modalités de contribution

Les communications qui peuvent être soumises à cet appel seront retenues en fonction des trois axes d'intervention thématiques cités. Chaque axe thématique s'organisera autour de temps de conférences/tables rondes/dispositifs dédiés et ouverts à tous les publics (académiques ou non— académiques).

Les propositions de communication (titre et résumé de 1500 caractères espaces compris) sont attendues pour le 15 décembre 2022 au plus tard, accompagnées de vos noms, prénoms, affiliations, adresse électronique et de trois à cinq mots clefs.

La langue principale du colloque sera le français, mais les propositions sont acceptées également en anglais ou toute autre langue, si le comité d'organisation est prévenu suffisamment en amont et accepte. De même, les présentations se feront principalement en français ou anglais. D'autres langues pourront être envisagées si cela est demandé. Chaque proposition sera anonymisée et relue en double aveugle par des membres du comité scientifique.

Ce colloque fera l'objet des productions suivantes :

  • La publication des actes du colloque (par défaut, nous proposerons une licence creative commons).
  • Des notes politiques (policy brief) synthétisant les apports majeurs de la classe dehors ainsi que les enjeux et axes de transformation de l'action publique, sous forme de recommandations.
    *Des supports éditoriaux divers sous forme de fascicules, d'infographies et de posters, de contenus audios et vidéos, de dispositifs de médiation ou tout autre objet qui pourra être proposé par les répondant∙e∙s pour favoriser l'accès à la connaissance de toutes et tous.

Nous remercions les auteurs et les autrices de bien vouloir adresser conjointement et directement leurs propositions à : antoine.h@fabpeda.org et michael.r@fabpeda.org.
Calendrier
Date limite de soumission : 15/12/2022
Date de notification aux auteurs : 01/02/2023
Date d'envoi de la version finale : 15/04/2023
Parution des actes : fin 2023


Comité scientifique
Eric Lenoir, Paysagiste (France)
Yann Lheureux, Chorégraphe (France)
Théa Manola, AAU, ENSA Grenoble (France)
Lionel Maurel, CNRS (France)
Mohammed Melyani, CAREF, Université de Picardie (France)
Alexandre Monnin, ESC Clermont Business School (France)
Anne-Louise Nesme, La Méandre(France)
Laura Nicolas, IMAGER, Université Paris-Est Créteil (France)
Philippe Nicolas, Professeur des écoles, Académie de Nancy-Metz (France)
Laurent Ott, Intermèdes Robinson (France)
Thierry Paquot, Institut d'urbanisme de Paris, Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (France)
Sophie Pène, DICEN-IDF, Université Paris Cité (France)
Irène Pereira, Université Paris-Est-Créteil (France)
Anne Philipson, Inspectrice de l'Éducation nationale, Académie de Toulouse (France)
Gilles Rabin, CNES (France)
Sophie Ricard, La preuve par 7 (France)
Michael Ricchetti, Fabpeda (France)
Caroline Rozenholc, LAVUE, ENSA Paris Val de Seine (France)
Arlette Sancery, Professeure honoraire, Université Paris IV (France)
Cristiana Teodorescu, Universitatea din Craiova (Romania)
Nicolas Tocquer, INSPE de Bretagne (France)
Anne Trespeuch-Berthelot, Histemé, Université de Caen (France)
Erwan Vappreau, Professeur des écoles, Académie de Rennes (France)
Christina Wolf, St. Gallen University of Teacher Education (Suisse)
Chris Younes, École Nationale d'Architecture de Paris (France)
Jean-Michel Zakhartchouk, Les Cahiers Pédagogiques (France)
Theodore Zeldin, Oxford University (UK)
Aurélie Zwang, LIRDEF, Université de Montpellier (France)


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un texte repris du site du colloque

Depuis l'Antiquité, l'éducation est souvent pensée en rapport avec la nature, qu'il s'agisse de la nature physique du monde environnant, de la nature humaine et des sociétés, de la nature de la connaissance, ou même de la nature de l'éducation elle-même. Aujourd'hui le thème de la nature envahit l'enseignement supérieur à l'occasion des défis de la transition écologique. Elle est tout à la fois envisagée comme condition, contrainte, finalité, valeur de référence, etc. Les pratiques pédagogiques s'en trouvent elles-mêmes remises en question, en tant que formes de rapports au monde, à la culture, à l'environnement. Les conceptions actuelles de l'enseignement, dominées par des figures comme Piaget, Vygotski, Ingold (entre autres), attirent déjà l'attention sur l'importance du rapport aux environnements naturels et sociaux dans les apprentissages. Mais comment l'enseignement supérieur s'approprie-t-il concrètement ces nouvelles attentes et les courants de pensée contemporains, en termes de pratiques pédagogiques ? Comment les pratiques de l'enseignement supérieur évoluent-elles dans ce nouveau contexte ? Quels impacts ces changements présents et à venir vont-ils avoir sur les pratiques d'enseignement dans le supérieur ? Quels nouveaux imaginaires et visions éducatives nourrissent la responsabilité des enseignant·e·s et des étudiant·e·s vis-à-vis de la nature ?

De ces questions générales découlent plusieurs axes de réflexions que nous proposons ici pour le colloque :

  • Les références à la nature dans les pédagogies du supérieur : ambiguïtés, contradictions et ouvertures
  • L'environnement et/ou sa transformation comme objet(s) de formation et de développement de compétences
  • Les interactions des étudiant·e·s et des enseignant·e·s avec leurs environnements physiques, naturels et sociaux
  • L'impact des politiques institutionnelles sur l'enseignement dans un contexte en évolution

Nous encourageons les communications co-écrites avec des étudiant·e·s.

Indications aux auteurs

Les propositions devront être soumises au plus tard le 15 janvier 2023 pour une évaluation des communications qui sera communiquée fin février 2023 au plus tard. Les contributions reçues avant le 15 décembre 2022 seront évaluées en priorité avec un retour aux auteurs pour fin janvier 2023.

Le dépôt des communications se fait via la plateforme SciencesConf, accessible depuis le site Internet du colloque : https://qpes2023.sciencesconf.org/

Toutes les communications devront respecter la feuille de style fournie sur le site internet du colloque, téléchargeable via ce lien.

Pour nous contacter : qpes2023@sciencesconf.org

Format des communications

Contribution individuelle

La forme retenue est un article écrit et finalisé d'un maximum de 25 000 signes tout compris (espaces, bibliographie), en respectant la forme graphique des actes, et pouvant se décliner selon trois catégories :

  • Analyse de dispositif (compte rendu de pratiques pédagogiques avec contextualisation, justifications et prise de recul)
  • Bilan de recherche en pédagogie (restitution de travaux de recherche critiques et documentés)
  • Point de vue (thèse personnelle et originale travaillée sur la base d'exemples, d'expériences vécues, d'arguments et d'éléments bibliographiques solides).

Les auteurs des contributions individuelles s'engagent à ne présenter que des contributions inédites. Au moins un des auteurs s'engage à être présent et à participer au débat lors d'une session animée par un discutant sous une forme conviviale d'échanges.

Symposium

Un symposium est constitué de trois contributions individuelles provenant de trois institutions différentes regroupées sous une thématique commune. La thématique commune est décrite en une ou deux pages précisant la pertinence du regroupement, les objectifs, la problématique commune et la structure retenue pour le symposium ainsi que la personne pressentie pour l'animer sur une durée de 1h30. Les contributions sont regroupées au sein d'un même document.

Atelier

Un atelier est une proposition d'activité pédagogique d'une durée de 1h30. Il vise à expérimenter une technique, une méthode ou une démarche pédagogique innovante ou particulièrement pertinente. Ce format (très limité en nombre) s'appuiera sur une description de quelques pages, précisant les objectifs, les modalités, les besoins et contraintes logistiques, les ressources fournies aux participants, la démarche, les techniques et méthodes, ainsi que l'ancrage théorique. L'objectif est de valoriser l'intérêt pour les participants, leur implication (nombre maximum de participants), et expliciter les clés importantes à retenir de l'exercice. Seront mentionnés les noms de la ou des personnes pressenties pour l'animer, et enfin un descriptif d'une page maximum qui sera inclus dans le programme du colloque.

Valorisation des contributions

Toutes les communications acceptées par le comité de lecture seront éditées dans les actes du colloque, remis sur place aux participants sous forme numérique et publiés en ligne. Si des modifications sont demandées aux auteurs pendant la phase d'évaluation, l'acceptation définitive sera soumise au respect de ces demandes.

Toutes les publications seront versées dans une archive ouverte et publique.

A l'issue de la phase d'évaluation des communications, les auteurs auront la possibilité d'introduire leur communication dans le processus de review pour une publication dans la revue des annales de QPES [1] . L'objectif des Annales de QPES est de proposer un accompagnement aux auteurs aux fins de la publication d'un article de type « compte-rendu de pratique » ou « scientifique ». Ce processus d'accompagnement s'inscrit dans l'approche du Scholarship of Teaching and Learning (SoTL).


[1] Les articles de cette revue sont sous licence Creative Commons Attribution - Non Commercial - No Derivatives 4.0 International


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Un article repris du magazine The Conversation, une publication sous licence CC by nd

Et si l'on faisait classe à l'extérieur ? Au lendemain du premier confinement, dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de Covid-19, cette proposition a été suivie par de nombreux enseignants. Des chercheurs et personnels de l'éducation se sont relayés dans les médias pour souligner les bienfaits de ce mode d'enseignement, aussi bien sur le plan sanitaire que pour la santé d'enfants souvent trop sédentaires. Le précédent ministre de l'Éducation en avait d'ailleurs aussi reconnu « la vertu pédagogique ».

Si le principe de la classe « en plein air, à ciel ouvert » prend son origine dans des mouvements pédagogiques du XIXe et XXe siècle, elle semble actuellement sortir d'une certaine confidentialité. Des reportages montrent ainsi des classes de maternelle ou de primaire qui, une fois par semaine, sortent dans un espace extérieur, à proximité de l'école, pour y réaliser des observations, des activités physiques ou des expérimentations, parfois très guidées, parfois beaucoup plus libres.

« Emmenez les enfants dehors ! », Crystèle Ferjou (“7 jours sur la planète”, TV5 Monde).

Cette modalité pédagogique et didactique, qui peut être mise en place autant en milieu urbain que rural, n'est actuellement cadrée par aucun texte officiel spécifique. Dans les représentations, il est donc devenu courant de l'assimiler à l'éducation au développement durable. Cette association se retrouve sur des sites académiques ou des ouvrages de pédagogie.

Pourtant, cette affiliation repose sur un malentendu, ou plutôt sur une méconnaissance du cadre institutionnel général de l'éducation au développement durable. Celle-ci est par ailleurs sous les feux des projecteurs avec le défi climatique et les enjeux relatifs à la biodiversité. Mais que disent les textes officiels de l'Éducation nationale à son sujet ? Et en quoi la classe dans la nature s'ancre-t-elle dans d'autres approches ?

Une éducation à la gestion de la nature

Le cadre normatif et conceptuel de l'éducation au développement durable a été bâti autour de sept circulaires, parues entre 2004 et 2020, et une note de service en 2013, date à laquelle l'éducation au développement durable est entrée dans le Code de l'éducation.

L'éducation au développement durable scolaire est fille de plusieurs recommandations internationales : en 1992, le chapitre 36 de l'Agenda 21, en 1997, la conférence internationale de Thessalonique et, en 2002, le Sommet de Johannesburg sur la Décennie des Nations unies pour l'Éducation en vue du Développement Durable. Ces textes internationaux cadrent l'éducation comme un moyen « au service du développement durable ».

Or avec le développement durable, l'éducation se voit subordonnée à une perspective économique de croissance théorisée à la fin du XXe siècle, comme une solution pour faire face aux enjeux du XXIe siècle :

« Aujourd'hui, ce dont nous avons besoin, c'est une nouvelle ère de croissance économique, une croissance vigoureuse et, en même temps, socialement et environnementalement durable. » Rapport Brundtland (1987).




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En France, cet horizon conduit à une mise à distance de la nature et des pratiques éducatives dans la nature. En adoptant explicitement une éthique centrée sur l'humain et son développement économique, l'éducation environnementale est désormais appréhendée par la rationalité et la gestion de l'environnement, en mettant à distance des approches sensibles et naturalistes, souvent qualifiées oralement d'attention aux « petites fleurs » et aux « petits oiseaux ».

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Dès 2004, et pendant plus de dix ans, le mot « nature » – au sens de milieu ou d'environnement – est totalement absent des textes officiels français de cette éducation. À partir de 2007, les sorties scolaires et les dispositifs d'immersion du type « classes de mer », « classes de neige » et « classes vertes », n'y sont plus évoqués. La circulaire de 2015 est une exception en instaurant les « coins nature » et en conseillant de nouveau des « sorties dans la nature ». En 2020, les sorties sont présentes dans une parenthèse mais le texte cantonne la nature à un objet de diagnostic ou à un patrimoine à valoriser par les élèves. Elle est ainsi inféodée à la gestion humaine.

En d'autres termes, dans l'éducation au développement durable des textes officiels français, la nature n'est ni pensée pour elle-même ni en tant qu'agent éducatif. Or il en est tout autrement pour nombre de pratiques et d'orientations dans la classe dehors.

Une éducation avec la nature

Précisons que les pratiques de classe dehors sont caractérisées par des objectifs très divers. Les intentions des enseignants peuvent aller de la couverture stricte des programmes, au bien-être de l'élève en passant par la reconquête de la place de l'enfant dans la ville.

Lorsque les objectifs sont strictement disciplinaires, les contenus peuvent donc être très éloignés des problématiques socio-écologiques. En se basant sur la nature, parfois avec des outils apportés in situ (livres, loupes, matériel plastifié, etc.), les élèves travaillent les mathématiques, les sciences, le français, les arts plastiques, l'éducation physique et sportive. La nature est utilisée pour les apprentissages formels : des brins d'herbe pour compter ou pour classer, un bâton et le sol pour faire du graphisme, le paysage pour dessiner, pour inventer un poème ou une histoire, des rondins de bois pour créer un parcours…

Mais, au-delà, lorsque les espaces de pratique sont suffisamment « ensauvagés », la nature peut littéralement entrer dans les relations éducatives. Elle contribue à l'apprentissage de deux façons, soit d'une façon formelle, lorsque ses manifestations sont présentées, expliquées et mises en avant par l'enseignant, soit d'une façon informelle, par le simple fait de s'y trouver en immersion.

Avec le Covid-19 la classe en plein air a la cote (Le Parisien.

De premiers travaux publiés de la recherche-action participative Grandir avec la nature montrent en effet que les enseignants construisent des savoirs
sur des situations vécues au dehors et non planifiées : un oiseau qui passe, un changement dans la saison, des bruits… Ils contribuent aussi à montrer que la nature est une source d'apprentissage à travers la construction, par l'expérience, de liens identitaires et d'attachement à l'environnement.

Cette part informelle, nommée écoformation, place l'éducation des élèves dans une perspective bien plus orientée vers le devenir de l'être humain que vers un programme économique prédéfini.

Une éducation « par en bas »

La classe dehors n'est donc pas assimilable à l'éducation au développement durable telle qu'elle est prescrite dans les circulaires de l'Éducation nationale. Construite par la mobilisation d'acteurs de terrain, dont des professionnels de l'éducation à l'environnement qui ont alerté dès 2008 sur la diminution des pratiques éducatives au dehors, elle est en mesure d'intégrer la nature dans ses méthodes, ses objectifs et ses finalités. C'est une éducation bâtie « par en bas », par le « terrain ».




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A contrario, l'éducation au développement durable est une éducation « par en haut » orientée par des instances internationales vers un objectif de croissance économique. Son adossement aux objectifs de développement durable (ODD) confirme cette tendance.

Ils sont désormais obligatoires pour toute labellisation d'établissement par exemple. Or dans les ODD, la « vie aquatique » et la « vie terrestre » sont en quatorzième et quinzième position, bien après « l'accès à l'emploi » (en huitième position) ou « l'innovation » (en neuvième position), ce qui exprime clairement les hiérarchies à l'œuvre.

En voulant inscrire leurs pratiques dans les cadres existants, les acteurs s'en accommodent et inventent perpétuellement des manières de faire. En l'occurrence, cela permet d'inclure la classe dehors dans le cadre de l'éducation au développement durable mais sans une prise de conscience de son essence. D'autant que l'institution scolaire elle-même alimente un certain flou.

Dans le récent « vademecum de l'éducation au développement durable », on peut lire quelques appels à l'éducation par la nature pour les petites classes à côté d'approches comportementalistes et gestionnaires, largement prédominantes. On pourrait donc en conclure qu'elle prend acte du terrain et incorpore ses évolutions et que peu importe les pratiques, elles peuvent toutes être classées « éducation au développement durable ».

Oui mais, au fond, pour quelles finalités et dans quel cadre éthique des relations humain-nature les enseignants voient-ils leurs pratiques professionnelles orientées ? Ce flou n'est-il pas un des principaux obstacles à sérieuse éducation environnementale ?

The Conversation

Aurélie Zwang ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.


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La psychopédagogie du bien-être : l'art d'apprendre à se sentir bien pour enseigner mieux !

Auteur(s)

megpare

mer 07/09/2022 - 13:55

No 2
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/sites/default/files/documents/numeros-tableau/Le_Tableau_NGoyette_VF.pdf

Dans ce numéro, Nancy Goyette, professeure et chercheuse à l'UQTR nous entretient à propos d'un nouveau champ de recherche qu'elle propose en sciences de l'éducation : la psychopédagogie du bien-être en contexte éducatif.

Mise en situation

Chloé Frédérique est professeure en histoire. Férue de l'époque médiévale, elle veut communiquer sa passion à ces étudiantes et étudiants. Elle passe plusieurs heures par semaine à planifier son cours et tente de varier ses stratégies pédagogiques pour capter leur attention. En présentiel, elle fait un tabac. La participation et l'engagement vis-à-vis des activités sont excellents. Cependant, la pandémie amenant l'obligation des cours en ligne, elle constate une baisse de participation. Plusieurs ferment leur caméra. Malgré ses efforts, elle nourrit de plus en plus un sentiment d'incompétence par rapport à ses stratégies pédagogiques en ligne. Elle se dit qu'elle n'est pas capable de transmettre sa passion et que, malgré toutes ses connaissances et l'entrain dont elle fait preuve, cela ne change rien. Elle partage son ressenti à un collègue qui la réconforte en lui disant qu'elle ne peut pas s'attendre à effectuer une prestation de travail similaire à avant la pandémie et qu'elle doit faire preuve d'autocompassion. Il lui conseille de cerner ce qui lui donne du plaisir, quel que soit le mode d'enseignement, et de demander une rétroaction aux étudiantes et étudiants sur leur expérience, afin de mieux orienter ses stratégies. En suivant ces judicieux conseils, Chloé constate lors d'une discussion informelle avec ceux-ci, que ses perceptions étaient erronées.

Pourquoi ?

Cinq raisons de s'intéresser à la psychopédagogie du bien-être en contexte universitaire :

  1. Pour s'approprier de nouvelles connaissances issues de la recherche en psychologie positive et en pédagogie.
  2. Pour favoriser un sentiment d'accomplissement et d'épanouissement professionnel par une meilleure connaissance de soi.
  3. Pour développer des stratégies propices à l'atteinte d'un équilibre cognitif, émotionnel et social.
  4. Pour promouvoir une bonne santé mentale individuelle et collective afin d'établir des climats propices au bien-être.
  5. Pour mieux accompagner des apprenantes et des apprenants dans un contexte pédagogique afin de les aider à progresser dans leurs parcours d'études.

Quoi ?

Qu'est-ce que la psychopédagogie du bien-être ?

La psychopédagogie du bien-être est un nouveau champ proposé aux sciences de l'éducation qui intègre la psychologie positive (Seligman et Csinkzentmilalyi, 2000) et la pédagogie. Son objet concerne le développement du bien-être, l'épanouissement de soi et le fonctionnement optimal chez les apprenantes et apprenants. Elle vise leur développement global par un accompagnement bienveillant. Elle favorise l'appropriation de stratégies pour cultiver une bonne santé mentale en contexte éducatif (Goyette, Gagnon, Bazinet et Martineau, 2020) et propose, entre autres, un processus réflexif pour analyser diverses situations, sous un angle mettant à contribution les ressources personnelles des individus pour favoriser le développement d'un agir compétent (Masciotra et Medzo, 2009 ; Gagnon, Goyette et Ouellet, sous presse).

Image par l'auteure

Ce que nous dit la recherche

Le bien-être en enseignement : une question de sens

Selon Seligman (2011), cinq éléments permettent aux individus de ressentir du bien-être : les émotions positives, les relations positives, l'engagement, l'accomplissement et le sens. Inspirée par cet auteur, Goyette (2016) en vient à la conclusion que l'élément central du bien-être en enseignement est le sens autour duquel gravitent principalement les émotions positives, les relations positives, l'engagement professionnel, le sentiment de compétence et la passion. La prise de conscience de ces éléments du bien-être aide les enseignantes et enseignants à construire des représentations de la profession plus optimistes qui alimentent leur persévérance malgré les défis quotidiens.

Comment ?

Le bien-être en enseignement, ça s'apprend par une réflexion sur soi !

Bien que chaque individu ait une conception personnelle du bien-être, ce concept fait l'objet de recherches dans plusieurs domaines et peut être défini selon de multiples dimensions : cognitive, affective, sociale et physique. En éducation, le bien-être s'élabore individuellement et collectivement à l'aide des nombreuses interactions quotidiennes qu'entretient la personne enseignante avec ses collègues, l'administration et bien entendu, les étudiantes et étudiants. En prenant conscience des éléments qui génèrent du bien-être pour soi en contexte de travail, elle peut être en mesure d'orienter des actions concrètes et d'exercer un pouvoir-agir sur différents aspects auxquels elle peut être confrontée puisque malgré les défis, les tâches quotidiennes ont du sens. Par exemple, la personne enseignante qui réalise que les relations positives avec et entre les étudiantes et les étudiants favorisent un climat cordial et collaboratif lors de ses cours, orientera ses stratégies pédagogiques vers des discussions collectives en lien avec les contenus pour faire évoluer les apprentissages. Elle consacrera également du temps à des discussions informelles avec les étudiantes et étudiants pour sonder leurs intérêts ou identifier leurs questionnements pour les rassurer, ce qui peut permettre de tisser des liens significatifs avec eux. Néanmoins, Il incombe toutefois à la personne enseignante d'effectuer une réflexion sur elle-même, qui l'amène à considérer son accompagnement selon des valeurs plus humanistes, qui favorisent la coopération, l'estime de soi et le respect de l'autre, quelles que soient ses particularités. Cela l'amène aussi à considérer la réussite non pas comme un objectif à atteindre, mais comme un processus où se côtoient les succès et les échecs : en effet, il faut considérer le fait que se tromper constitue une occasion d'apprentissage. Une personne enseignante qui se sent bien et qui est inspirante alimente souvent la motivation des apprenantes et apprenants (Magyar-Moe, 2015). À cet égard, la psychopédagogie du bien-être fournit des connaissances issues de la recherche au personnel enseignant pour qu'il développe une meilleure connaissance de soi, mais aussi des autres, afin de les accompagner avec bienveillance dans leur parcours. Elle promeut une bonne santé mentale individuelle et collective par le transfert de connaissances selon différents contextes pour permettre un meilleur accompagnement des autres dans un contexte pédagogique.

Finalement, favoriser des relations positives en s'intéressant à la réalité des étudiantes et des étudiants, en agissant avec bienveillance et en adoptant une approche axée sur leurs forces, peut leur permettre de persévérer. Par exemple, miser sur leurs forces et les nommer durant les cours peut augmenter leur engagement dans le processus d'apprentissage puisqu'ils envisageront certaines tâches difficiles comme étant réalisables, notamment par la prise de conscience qu'ils possèdent des compétences pour réussir. Les institutions éducatives incarnent souvent une approche axée sur les déficits et encouragent un apprentissage par la résolution de problèmes. On demande aux personnes de réfléchir sur des savoirs et des compétences qu'elles n'ont pas afin de mettre en place des moyens de s'améliorer. La psychopédagogie du bienêtre préconise plutôt une approche pédagogique qui encourage la découverte des forces et des talents des apprenantes et apprenants. Elle vise ainsi à faire émerger la confiance en soi qui permettra de progresser en visant plus loin que le niveau de maitrise attendu (Cooperrider et Whitney, 2005).

Références

Cooperrider, D. L. et Whitney, D. K. (2005). Appreciative Inquiry : A Positive Revolution in Change. Berrett-Koehler Publishers.

Della Fave, A. (2011). Psychologie Positive. Un parcours difficile entre idéal et réalité. Dans C. Martin-Krumm et C. Tarquinio (dir.), Traité de psychologie positive, De Boeck.

Gagnon, B., Goyette, N. et Ouellet, M. (sous presse). La création d'un modèle d'accompagnement mentoral, d'un dispositif de développement professionnel et d'un répertoire de ressources pour soutenir le développement d'un agir compétent chez les enseignants-mentors dans un centre de services scolaire. Enjeux et société.

Goyette, N. (2014). Le bien-être dans l'enseignement : étude des forces de caractère chez des enseignants persévérants du primaire et du secondaire dans une approche axée sur la psychologie positive [thèse, Université du Québec à Montréal Université du Québec à Trois-Rivières]. https://depot-e.uqtr.ca/id/eprint/7681/

Goyette, N. (2016). Développer le sens du métier pour favoriser le bien-être en formation initiale à l'enseignement. Revue canadienne en éducation, 39(4), 1-29.

Goyette, N., Gagnon, B., Bazinet, J. et Martineau, S. (2020). La communauté d'apprentissage au service du développement de l'agir compétent d'enseignantes en psychopédagogie du bien-être. Dans N. Goyette et M. Stéphane (dir.), Le bien-être en enseignement : tensions entre espoir et déceptions (p. 115-141.). Presses de l'Université du Québec.

Magyar-Moe, J. L. (2015). Positive Psychology in Classroom. Dans J. C. Wade, L. I. Marks et R. D. Hetzel (dir.), Positive psychology on the college campus (p. 133-166). Oxford University Press.

Masciotra, D. et Medzo, F. (2009). Développer un agir compétent : vers un curriculum pour la vie (1re éd.e éd.). De Boeck.

Seligman, M. et Csikszentmihalyi, M. (2000). Positive Psychology. An Introduction. American Psychologist, 55(1), 5-15.

Seligman, M. E. P. (2011). Flourish : A Visionary New Understanding of Happiness and Well-being. Free Press.

Pour en savoir plus

Goyette, Nancy (2021, 17 novembre). EDU6031_La genèse de la psychopédagogie du bienêtre [vidéo]. YouTube.

Goyette, N., Martineau, S., Gagnon, B. et Bazinet, J. (2020). Les effets d'une approche pédagogique préconisant la psychopédagogie du bienêtre sur la réussite éducative des élèves. Revue hybride de l'éducation, 4(3), 1-23. http://revues.uqac.ca/index.php/rhe/article/view/1072

Néo UQTR (2021, 12 août). Psychopédagogie du bienêtre : pour repenser les institutions éducatives, Université du Québec à Trois-Rivières, https://neo.uqtr.ca/2021/08/12/psychopedagogie-du-bienetre-pour-repenser-les-institutions-educatives/

Goyette, Nancy (2021, 3 février). La psychopédagogie du bienêtre : l'art d'apprendre à se sentir bien pour enseigner mieux ! [vidéo]. Pédagogie universitaire. https://pedagogie.uquebec.ca/webinaires/la-psychopedagogie-du-bienetre-lart-dapprendre-se-sentir-bien-pour-enseigner-mieux

D'autres questions à explorer

Comment valoriser davantage la psychopédagogie du bien-être dans les institutions universitaires pour établir une culture plus humaniste ?

Quelles stratégies employer concrètement dans un contexte d'enseignement à distance pour développer des relations positives et augmenter la motivation des apprenantes et apprenants ?

Comment diminuer la charge émotionnelle vécue en contexte universitaire pour permettre une meilleure santé mentale du personnel enseignant ?

Notice biographique

Image par l'autrice Nancy Goyette, Ph. D., est professeure et chercheuse au Département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Elle s'intéresse au bien-être dans les institutions éducatives ainsi qu'à la construction identitaire chez les enseignants. Elle développe la psychopédagogie du bien-être, qui étudie l'impact de l'enseignement et de l'apprentissage de divers concepts se rattachant au bien-être en contexte éducatif, afin que tous les individus développent leur plein potentiel. Ses recherches actuelles, financées par le Fond de recherche société et culture (FRSC) et le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), explorent la construction identitaire qui favorise le bien-être chez des enseignants novices lors de leur insertion professionnelle et le bien-être des enseignants québécois et belges au regard du concept de capital psychologique.

Mentions de responsabilité

Cette capsule est une production de la Direction du soutien aux études et des bibliothèques (DSEB) en collaboration avec le Groupe d'intervention et d'innovation pédagogique (GRIIP)
Comité éditorial : Claude Boucher, Marie-Christine Dion, Marie-Ève Gonthier, François Guillemette, Alain Huot et Céline Leblanc
Coordination : Marie-Ève Gagnon-Paré et Marie-Michèle Lemieux
Rédaction : Nancy Goyette
Correction : Isabelle Brochu et Dominique Papin


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Une évolution de la conférence "La coopération, un changement de posture : vers une société de la coopération ouverte" [1] donnée à QPES 2019 "Questions de Pédagogies pour l'enseignement supérieur", pour l'intervention au réseau des travailleurs sociaux Humacitia, le 18 juin 2022.

Vous trouverez ici le diaporama commenté de cette intervention.

Une présentation qui prend en compte l'expérience des Riposte créative initiés en réponse au confinement et qui se prolongent aujourd'hui face à la crise climatique et la préparation du 10ème Forum des usages coopératifs sur la convergence des transitions.


Une facilitation graphique de Julie Boiveau mise à dispositiuon sous licence CC by sa nc

La problématique

La coopération, la capacité à innover, la créativité, figurent en tête des référentiels des compétences attendues dans ce 21ème siècle d'une société transformée par nos usages du numérique et confrontée à l'urgence des transitions. L'abondance des contenus numériques, des innovations sociales et des initiatives locales appellent à des changements de posture pour "faire avec", "être en attention", "donner à voir", apprendre à coopérer et développer les communs.

Des années d'expérience dans le développement des pratiques collaboratives dans la société nourriront cette présentation centrée sur l'apport de la coopération ouverte et son importance face aux crises vécues.

Freins et facilitations seront illustrés et déclinés dans le domaine de la formation au travers d'interviews d'acteur.ice.s publiés dans histoires de coopérations.

Les crises du covid et celle plus grave encore et à venir du changement climatique appellent à une démarche collaborative en coopération ouverte qui associe chacun.e dans une démarche d'intelligence collective qui renforce son pouvoir d'agir.

Les Riposte Créative initiés durant la crise serviront d'exemples pour illustrer des processus collaboratifs qui peuvent contribuer aux transformation nécessaires pour que notre planète soit vivable et désirable.


- Le diaporama du 18 juin 2022 (pdf) :

Les diapos avec les liens et quelques commentaires


Diapo 1


Je fais le choix d'explorer aujourd'hui la coopération ouverte c'est-à-dire une forme de coopération qui donne à voir et met en partage au-delà du seul groupe d'acteur.ice.s concerné.e.s et permet l'implication des personnes dans les processus de transformations profondes que nous traversons.

Cette présentation se déroulera en 4 parties :

  • d'où vient la notion de coopération ouverte ? le lien avec les communs ;
  • comment cette pratique est d'abord un changement de posture ?
  • les compétences, freins et facilitations de la coopération au croisement d'un travail universitaire et d'une série d'interviews d'acteur.ice.s de la coopération ;
  • la coopération pour un monde vivable et désirable.

Diapo 2


D'où je parle ...

- Innovation pédagogique : https://www.innovation-pedagogique.fr/

L'auteur : Michel Briand est professeur émérite à l'IMT Atlantique et animateur du site contributif « Innovation Pédagogique » sur l'enseignement supérieur francophone. Il a été membre du Conseil National Numérique (2013-16). Élu au numérique, à la démocratie locale puis à l'économie sociale et solidaire à Brest, de 1995 à 2014, il a développé une démarche facilitant l'implication, le pouvoir d'agir avec le souci d'une e-inclusion. Acteur des réseaux coopératifs et des communs il édite un blog sur les démarches contributives et donne à voir ce qui motive les personnes à coopérer et participer aux communs. Il co-anime les sites ouverts « a-brest.net », « Bretagne-créative.net » et les événements tels Brest en communs ou le Forum des usages coopératifs. Dans le contexte du confinement il a co-initié les Riposte Créative, outil collaboratif, prolongé aujourd'hui en réponse aux crises traversées.



Diapo 3


Dans cette première partie je vais décrire l'origine de ce terme de coopération ouverte qui a émergé dans une société transformée par nos usages du numérique. Je le relierai à la renaissance des communs favorisée par l'abondance auquel nous confronte pour la première fois de son histoire le numérique.

La notion de compostabilité s'interrogera sur les conditions de réutilisation des idées.

Je finirai par présenter quelques initiatives qui sont autant de facettes du partage et de la coopération ouverte.


Diapo 4


Je reprends ici quelques éléments d'un article écrit avec Elzbieta Sanojca, auteure d'une thèse sur la coopération en préparation du 8éme Forum des usages coopératifs. Comme de nombreux termes qui désignent des pratiques liées au usages du numérique la “coopération ouverte” a une origine anglophone. La plus ancienne source trouvée est un de David A. Curry sur le système d'exploitation UNIX qui décrit en 1992 comment les informaticiens coopèrent. La “coopération ouverte” est associée au modèle du logiciel libre et d'un environnement de travail ouvert où les personnes coopèrent en mettant en partage leur productions.

Pour Laurence Lessig, inventeur des licences Creative Commons les plateformes ouvertes favorisent des interactions entre personnes et sont facteur de créativité et d'innovation.

Selon notre exploration, le terme est utilisé pour la première fois en France en 2006 par Dominique Cardon, pour décrire les “racines du modèle de l'innovation ascendante”, issues du travail d'Eric Van Hippel comme :

  • la nécessité de trouver par soi-même des solutions adaptées à ses besoins :
  • une proximité avec les usages ;
  • si bien que chercher à la protéger et à contrôler ses utilisations affaiblit sa qualité ; et ses chances d'attirer à elle l'attention des industriels.

En 2012, Joël Candau dans "Pourquoi Coopérer ?" introduit une approche anthropologique de la coopération ouverte opposant : un altruisme « de clocher » , borné au groupe d'appartenance (famille, « communauté », nation, etc.) qu'il nomme coopération fermée et un altruisme où la coopération va au-delà des limites de ce groupe qu'il appelle coopération ouverte.

C'est à partir de ces années 2012 et 2013 que le terme va entrer dans le champ des acteurs de la coopération, que l'on peut aussi relier aux travaux de Jean Michel Cornu sur de nouvelles approches de la coopération.

Michel Briand l'introduit dans la conférence "Territoires en réseaux : d'internet aux innovations sociales ouvertes" :

La coopération ouverte est un profond changement de culture dans une société où le travail est organisé de manière cloisonnée et hiérarchique. Apprendre à donner à voir, copier, réutiliser, partager demande du temps parce que ce n'est pas dans nos habitudes. Aujourd'hui l'innovation ouverte progresse dans les entreprises où elle stimule la créativité, dans les services où elle favorise l'implication des personnes, dans le tiers secteur où elle est facteur d'innovation sociale.

- avec en lien la carte ouverte Open Street Map en "live"


voir aussi


Diapo 5


De la même façon que l'émergence du numérique a favorisé le développement de pratiques de coopération ouverte, l'abondance des biens numériques non rivaux et non exclusifs a permis une renaissance des communs pour reprendre de titre de l'ouvrage de David Bollier dont le sous titre est d'ailleurs « Pour une société de coopération et de partage. »

Un bien est non rival lorsque sa consommation par un agent n'affecte pas la quantité disponible pour les autres agents, et l'air en est un exemple

Il est exclusif lorsque l'usage par l'un empêche celui d'un autre tel un jouet d'enfant
Comme le définit Elinor Ostromdans Governing the Commons 1990« les biens communs (ou simplement « communs ») sont des ressources, gérées collectivement par une communauté selon une forme de gouvernance qu'elle définit elle-même ».

Pour expliciter la définition, je prendrai l'exemple des jardins partagés ou un groupe d‘habitants, souvent du quartier, cultivent un jardin et se répartissent la récolte selon des règles qui vont varier d'un jardin à l'autre.


diapo 6


Les communs numériques tel wikipedia organisent la production de contenus réutilisables . Ils sont ainsi une forme de coopération ouverte puisqu'ils s'adressent à tous. Comme l'indique cette présentation des 8 principes d'Elinor Ostrom , si vous avez déjà contribué à cette encyclopédie vous avez pu vous rendre compte que cela ne se fait pas sans règle : les contenus (textes, images) doivent respecter la licence CC by sa, citer leurs sources, respecter un principe de neutralité.

Les Communs existent quand l'action collective vient transformer une ressource en un moteur de cohabitation, de démocratie et de co-construction d'un futur partagé.

dans Les communs candidats aux municipales, Vecam 2014

C'est ce qu'explore le projet Erasmus « les communs en actes » auquel j'ai participe avec la 27éme région, l'association savoirs communs et les villes de Grenoble, Brest et Lille. Nous avons visité les communs dans 8 pays européens : ce sont par exemples les chartes communales entre une municipalité et un groupe d'habitant qui prend en gestion une rue ou une école en dehors des heures d'utilisation, en Italie [2] les dizaines de friches urbaines réhabilitées à Bruxelles ; ou la dynamique « Barcelone en communs » de la précédente municipalité des dynamiques portées aussi en France par la Coop des communs.

Les Communs ouvrent une troisième voie entre service public et le monde marchand. Ainsi les contenus des MOOC d'OpenClassroom sont réutilisables en formation non marchande alors que ce n'est pas la cas de certains MOOC d'universitaires pourtant salariés de la fonction publique qui lorsqu'ils sont sous copyright interdisent par défaut une réutilisation des contenus. En s'appuyant sur la capacité de collectifs à porter de l'innovation et de la transformation sociale, les Communs sont susceptibles d'enrichir nos démocraties représentatives et de contribuer aux transitions que nos sociétés doivent inventer.

C'est en ce sens que cette l'émergence des communs peut être associé à un nouvel imaginaire, mais sur les 1000 jardins partagés et composteurs collectifs en Bretagne accompagnés par l'association Vert le jardin, peu des 15 000 personnes concernées se considèrent comme des « commoneurs ». Comme la coopération ouverte, les communs sont une idée en émergence.

- voir aussi :

  • Les Communs, candidats aux municipales par Vecam 2014.
  • "Facilitatrice, protectrice, instituante, contributrice : la loi et les communs", septembre 2016, par Valérie Peugeot, Contribution au colloque de Cerisy - Vers une république des biens communs ? - Septembre 2016 – Version de l'auteur.

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La coopération ouverte rejoint aussi des enjeux de société. Nous comprenons aujourd'hui que les conditions matérielles de notre monde ne permettent pas une croissance et un progrès présentés hier comme naturels.

Nous sommes rentrés dans une période appelée anthropocène pour désigner cette ère de l'homme comme un temps géologique profondément marqué par l'activité humaine. Aujourd'hui les questions du climat interrogent notre survie même.
Pour limiter l'impact et le nombre de ces déchets, de nombreuses solutions se développent et une multitude d'expérimentations sont en cours : mouvement zéro déchet, bacs à compost, repair cafés, ressourceries, etc.

Dans ce monde où toute l'humanité est en interaction , Joel Candau interroge l'articulation entre une coopération fermée qui s'appuie sur l'appartenance à un groupe, une nation avec son corollaire d'identité et de risque de stigmatisation de l'autre et la coopération ouverte à tous.

Cette question de la coopération ouverte et des communs prend alors un sens sociétal.

C'est dans cet esprit d'un écosystéme vivant qu'il est possible d'interroger la production des idées au regard de la compostabilité. Qu'en est-il lorsque l'on aborde une autre des productions humaines, omniprésente à l'ère du numérique : celle des connaissances ? La seconde vie des idées, de l'immatériel, de nos projets reste un impensé alors même qu'ils sont le fruit de notre énergie vitale, ressource irremplaçable s'il en est.

La compostabilité : pour un écosystème de projets vivaces, via Laurent Marseault et Romain Lalande, sur Vecam, 2014.

Dire qu'ils ne sont pas compostables, c'est entrevoir qu'à la mort du projet, celui-ci va faire des tas de déchets que l'on ne pourra pas recycler et des disques durs pleins de projets qui ont été fabriqués mais que personne ne peut réutiliser. Le fait d'aller chercher dans le monde du vivant des critères que l'on pourrait essayer d'appliquer, je trouve cela intéressant et pertinent. En pratique, cela sous-tend de travailler dès le démarrage d'un projet sur sa compostabilité. Autrement dit, on va se débrouiller pour laisser des petits grains du projet à des niveaux réutilisables par d'autres : des photos, par exemple, avec des formats ouverts et partagées au maximum pour que tout le monde puisse les réutiliser des contenus ouverts et accessibles pour que d'autres personnes puissent les réutiliser.

voir aussi :

Diapo 8


Nous retrouvons ce souci de la coopération et du partage dans un archipel d'idées et d'initiatives :

En voici quelques uns :


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Une démarche décrite dans l'article : "Retour d'expérience sur une politique publique du numérique à Brest, Premier pas vers une gouvernance contributive"


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Dans cette troisième partie nous allons croiser deux approches :

  • une basée sur les compétences pour coopérer, issue d'un travail universitaire ;
  • et une seconde, issue d'une trentaine d'interviews d'acteurs de la coopération ouverte qui serviront d'illustrations.

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Le nuage de mots construits à partir des mots clés cités dans les 31 interviews d'acteur.ice.s de la coopération dans Histoire de coopérations


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Le terrain de recherche concerne l'étude de cas de la formation professionnalisante « Animacoop : Animer un projet collaboratif ». C'est une formation « hybride » c'est-à-dire en partie à distance et en partie en présence d'une durée de 3 mois. Elle est destinée aux personnes impliquées dans un projet coopératif. Ce sont le plus souvent des acteurs professionnels d'associations et de collectivités locales et dans une moindre mesure d'entreprises ou de bénévoles.

72 réponses obtenues ont permis de valider le cadre de référence des compétences collaboratives composé de 34 items de compétences collaboratives issus de la revue de littérature Ce cadre aborde la collaboration dans une logique temporelle et prend en compte un « avant », un « pendant » et un « après » du processus collaboratif. C'est à ce cadre que les données collectées ont été confrontés.

Le terme de « compétences charnières » désigne des compétences sans lesquelles, la collaboration serait difficile à mettre en œuvre. Elle ont été définies par le procédé de triangulation des meilleurs résultats, obtenu à partir des trois outils de collecte : questionnaire, entretiens compréhensifs et observations élicitées.

Trois d'entre elles sont appelé « compétence pivots », puisque leur présence modifie la qualité du processus collaboratif, comme cela pu être observé dans les 4 projets suivis pendant plusieurs mois" dans La coopération ouverte, un concept en émergence

voir aussi

  • Sanojca, E. (2018 a). Les compétences collaboratives et leur développement en formation d'adultes. Le cas d'une formation hybride. Thèsede doctorat en Sciences de l'éducation. Rennes, Université Rennes 2.
  • Sanojca E. (2018 b). « L'état d'esprit collaboratif », « faire avec » et « avoir le souci des communs » : trois pivots pour coopérer, articledu blog Coopérations, article en ligne, mars 2018.

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La disposition à coopérer est une condition sine qua non de la coopération ». Si les personnes ne disposent pas d'une telle attitude, elles auront tendance à privilégier les relations compétitives et donc à freiner la collaboration, voire la rendre impossible.

dans La coopération ouverte, un concept en émergence

Si des personnes n'ont pas d'élan, ne croient pas réellement dans les possibles du projet alors ce sera compliqué... Je me souviens avoir tenté de collaborer avec une personne qui à chaque fois avait en tête et listait ce qui n'allait pas fonctionner

Monique Argoualc'h, coopérer en attention, avec des élèves en dispositif relais

voir aussi

Mes élèves m'ont appris une condition et un but des Coopératives pédagogiques : nous devons changer de posture en tant qu'enseignants. Il nous faut considérer que nous devons rester des apprenants tout au long de notre vie d'enseignants. Auprès de mes élèves, j'ai appris à oser, à prendre des risques, à lâcher prise, à lancer des activités en ne sachant pas forcément où on allait. Enseigner, cela peux être une aventure. A l'École, les élèves, tous les élèves, travaillent quand le travail a du sens ce qui est le cas lorsqu'il a un destinataire. On lit, on écrit, on publie… pour quelqu'un !

Jean Michel Le Bault, dans cette interview


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Lorsqu'elle se manifeste, renforce l'engagement des personnes dans le projet collaboratif et leur motivation à travailler ensemble. A l'inverse, dans un projet collaboratif pensé par une personne seule, son énergie passerait à « pousser » d'autres à y entrer, à mobiliser. Et souvent, son projet dit « collaboratif » s'arrête à cette étape.

dans La coopération ouverte, un concept en émergence


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Elle indique la maturité du groupe et consolide l'engagement à long terme. Elle rejoint l'importance croissante prise par les communs dans de nombreux projets.

dans La coopération ouverte, un concept en émergence

voir

Tela Botanica est un réseau collaboratif de botanistes francophones dont 80 % résident en France1 (environ 45 000 inscrits au total). L'idée que l'on peut se faire du partage n'est pas la même. Mettre les données sous licences libres, réutilisables, y compris de manière commerciale est plus compliqué et cela nous a demandé plusieurs années alors qu'en réalité personne ne fait d'argent avec ces données que l'on met en partage !

La première année on a été surpris par le nombre de fils de discussions : environ 20 000 ! Soit plus de 100 000 messages émis durant les six semaines du MOOC ! C'est ainsi que l'on a vu apparaître des demandes du type : « j'habite près de telle ville (aussi bien en France qu'en Nouvelle-Zélande ou au Canada), est-ce qu'il y a d'autres gens à proximité qui suivent le MOOC ? Pour le dernier MOOC je crois que l'on a eu 120 groupes

Tela botanica les pro-am producteurs de connaissances mises en commun
dans Interview de Daniel Mathieu, fondateur de Tela Botanica

voir aussi

  • Outils réseaux une organisation économique « en partage » qui fonctionne

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Elle indique la maturité du groupe et consolide l'engagement à long terme. Elle rejoint l'importance croissante prise par les communs dans de nombreux projets.

Pour moi, c'est l'Ego. Un sacré morceau. Quand certains cherchent à exister par ce qu'ils donnent à voir. Quand, fondamentalement, ils ne veulent pas donner et partager. Avec une sorte de condescendante, ils pensent avoir tout inventé et être les premiers. Sans penser deux secondes qu'ils ne sont que d'humbles maillons d'une grande chaîne qui les dépasse. Je pense que ceux-là ne sont pas dans le partage sincère et souvent pas non plus dans l'écoute apprenante. Ces personnes disent qu'elles écoutent mais en fait elles ne tiennent aucunement compte de ce que disent les autres, elles ne sont pas dans l'écoute re-formatrice. Quand les gens n'ont pas travaillé cette notion-là, la coopération devient compliquée.

Laurent Marseault : la coopération ouverte : un partage sincère !

Les représentations que l'on peut avoir des modèles existants. Par exemple celle qu'un groupe ne peut fonctionner qu'avec un leader. On peut passer du temps à partager la démarche, le projet, comment cela a été mis en place, ce qui se joue dans un échange entre les personnes plutôt horizontal que vertical, que la responsabilité d'animer un rendez-vous est un rôle qui n'est pas figé sur une personne, il y a parfois des choses qui ressortent et qui freine la coopération comme « il faut bien un leader » « les modèles qui fonctionnent ne sont pas cela ». Même si d'autres récits existes celui encore dominant du modèle pyramidal, freine les projets en coopération.

Interview de Benoit Vallauri, acteur de réseaux coopératifs de la culture et animateur du Tilab


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Les démarches en coopération nécessitent de s'autoriser à prendre du temps, le temps pour instaurer de la confiance entre les personnes, le temps de réfléchir à ce que l'on fait et comment on va le faire, le temps de tester les choses de les observer pour réinterroger le cadre que l'on est en train de construire .

La coopération, c'est aussi ce temps pour réfléchir à comment on va travailler ensemble. C'est un aspect que l'on aborde souvent avec les participants des rendez-vous 4C, consacrer du temps à regarder comment ça fonctionne et chercher comment ça pourrait mieux fonctionner.

Interview d'Angélique Robert, facilitatrice de l'engagement des publics


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- le réseau Interpole


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Confronté à un confinement qui rendait caduque les dispositifs de formation existants, la direction innovation innovation nous a sollicité pour agir en "Riposte Créative". Avec Laurent Mrseault nous avons proposé un espace collabortaif ouvert et convivial (au sens, d'Ivan IIlich qui )
Cette mise en oeuvre qui se prolonge encore aujourd'hui avec l'expérimentation des cercles d'apprentissage, nous a incité à l'expérimenter rn Bretagne et dans l'enseignement supérieur francophone.


voir aussi


- Coopération ouverte pour un monde vivable et désirable (Tournai 2019)




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- Laurent Marseault : la coopération ouverte : un partage sincère !

- " Favoriser la bienveillance, l'écoute, la confiance, le partage des connaissances et la transparence", interview de Bénedicte Gastineau, vers un fonctionnement collaboratif d'un laboratoire de recherche et d'enseignement

Et pour terminer une proposition d'écouter la musique de wikipedia en écriture

un lecteur multimédia qui traduit de façon ludique les « modifications récentes » apportées à Wikipédia.

Chaque édition engendre un son, ce qui produit une musique orchestrale relaxante et mélodieuse, en mode pentatonique2. Les cloches issues d'un célesta correspondent à des ajouts (« (+x) ») apportés à des pages de Wikipédia, les cordes d'un clavicorde à des retraits (« (-x) ») de page. De plus, la hauteur dépend de la taille de l'édition. Un nouvel utilisateur ayant créé un compte sera accueilli par un accord au violon


[1] la conférence filmée à QPES 2019

[2] reprise aujourd'hui à la ville de Grenoble


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Un article repris du magazine The Conversation, une publication sous licence CC by nd

Traditionnellement discrètes et à distance de l'agitation caractéristique du débat public, les écoles d'ingénieurs ont été récemment placées au centre de l'attention médiatique. En effet, le 30 avril dernier, à l'occasion de la cérémonie de remise des diplômes organisée par l'école d'agronomie Agro ParisTech, un discours prononcé par huit élèves ingénieurs a suscité une onde de réactions particulièrement conséquente.

Vivement critiques du modèle économique capitaliste, du secteur industriel jugé néfaste sur le plan écologique et des promesses techno-scientifiques présentées comme des instruments de préservation de l'ordre existant, les propos tenus révèlent une dimension revendicative peu répandue au sein d'un corps professionnel qui exprime généralement un faible intérêt pour les questions d'ordre social et politique.

Des étudiants d'AgroParisTech refusent les « jobs destructeurs » promus par leur école.

S'il demeure numériquement minoritaire dans le champ professionnel en question, l'engagement écologiste des ingénieurs prend une ampleur inédite depuis la fin des années 2010. En effet, on observe entre 2017 et 2019 l'émergence de plusieurs organisations dédiées aux enjeux écologiques et fondées, totalement ou en partie, par des élèves ingénieurs, parmi lesquelles « La Bascule », « Ingénieur·e·s Engagé·e·s », « Pour un réveil écologique » ou encore « Together for Earth ».

Si les arènes mobilisées pour porter la défense de la cause sont nombreuses, notamment économiques et politiques, l'une d'entre elles apparaît particulièrement sollicitée : l'arène scolaire. L'école d'ingénieur elle-même devient dès lors le lieu où peuvent être menées des actions collectives et exprimées des revendications, ainsi que l'atteste le discours des élèves ingénieurs agronomes évoqués plus haut.

Actions sur les campus

Le choix des écoles d'ingénieurs comme terrain de lutte n'est pas tout à fait récent et n'apparaît par ailleurs guère étonnant dans la mesure où ces dernières peuvent être appréhendées comme des institutions « enveloppantes ». En effet, ces établissements concentrent, par une vie associative habituellement très intense et la construction d'une identité collective particulièrement marquée, l'essentiel des activités et de l'attention quotidiennes des élèves ingénieurs durant leur formation.

On observe ainsi l'émergence au cours des années 2000 de groupes d'élèves organisés en clubs ou en associations et mobilisés sur les questions environnementales. Les actions mises en œuvre peuvent être d'ordre moral d'une part et viser à faire changer les comportements individuels des pairs à travers par exemple la vente de paniers de légumes, de mise à disposition de fruits frais ou encore par la suppression des gobelets plastiques à la cafétéria.

Des actions menées sont d'ordre pédagogique d'autre part et cherchent à sensibiliser aux diagnostics scientifiques établis au sujet de l'urgence écologique et de ses différentes composantes, dont le changement des climats, la destruction de la biodiversité ou encore les multiples épisodes de pollution. Il s'agit ici de proposer des projections de documentaires, des conférences, des animations ludiques ou encore des séances de discussion autour de rapports scientifiques, généralement ceux publiés par le GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat).




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Ces deux catégories d'action s'enracinent dans une certaine vision de la cause écologique. En effet, si les mouvements écologistes implantés en France à partir des années 1960-1970 poursuivent l'ambition de transformer le fonctionnement politique et économique des sociétés modernes industrielles, leurs protestations se transforment au cours des années 1980 et s'orientent vers un nouveau registre, celui d'une expertise scientifique et juridique.

Cette nouvelle mise en langage des revendications écologistes permet de formuler des discours subitement plus intelligibles aux yeux d'ingénieurs considérant fréquemment les questions politiques comme irrationnelles car mobilisant insuffisamment la raison scientifique. Co-traités à l'échelle internationale par les ONGE (Organisations non gouvernementales environnementales.) et les institutions mondiales telles que les Nations unies, les problèmes écologiques se voient pris en charge à l'aide d'innovations technologiques et de nouvelles normes réglementaires – souvent peu contraignantes.

Ces solutions n'apparaissent cependant aujourd'hui plus convaincantes pour beaucoup de jeunes ingénieurs investis pour défendre les intérêts écologiques. En effet, les rapports scientifiques publiés, notamment ceux du GIEC et de l'IPBES (Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques), font état d'une situation planétaire toujours plus dégradée. Des entrepreneurs de cause, et notamment des ingénieurs reconnus, proposent une lecture extrêmement critique des mesures politiques et économiques environnementales mises en œuvre qui interrogent par ailleurs les finalités de l'ingénierie.

Une identité professionnelle questionnée

On observe ainsi l'émergence, parmi les ingénieurs écologistes, d'interrogations réflexives afférentes à leur profession, souvent accompagnées d'un sentiment de « perte de sens » fondé sur l'impression d'un écart manifeste entre l'adhésion personnelle à des valeurs associées à la cause écologique et un emploi dont les activités peuvent être jugées néfastes à l'égard de l'environnement.




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La définition même du métier devient ainsi un enjeu de lutte qui se traduit par l'élaboration de nouvelles revendications soutenues par les élèves ingénieurs au sein de leurs écoles. Outre les actions d'ordre moral et pédagogique, ces protestations se dirigent davantage vers les offres de formation proposées par les établissements et se déclinent en deux points.

Le premier exprime le besoin de comprendre les effets écologiques des technologies étudiées et formule explicitement la demande que cette dimension soit abordée au sein des enseignements techniques. Le second s'adresse aux directions des écoles et sollicite l'intégration de cours en sciences humaines et sociales dans les cursus afin d'acquérir des connaissances réflexives et critiques au sujet des sciences, des techniques et de leurs interactions avec la société.

Ces changements importants exigés par ces élèves ingénieurs se heurtent à des difficultés multiples. Outre les freins et les inerties d'ordre organisationnel, logistique et économique, les représentations afférentes au rôle de la technique et de l'ingénieur constituent des obstacles également majeurs.

En effet, les réponses fréquemment adressées aux élèves par les directions des écoles présentent un modèle idéal bien situé du métier d'ingénieur. Ce dernier doit ainsi intégrer les grands groupes industriels et participer au développement du progrès perçu comme linéaire grâce à des innovations technologiques toujours plus sophistiquées.

Cette trajectoire ne semble cependant plus correspondre à l'identité professionnelle désormais recherchée par les élèves ingénieurs. Ceux-ci visent ainsi davantage à enrichir la conception de l'ingénierie en intégrant d'autres dimensions, notamment sur les questions d'éthiques, d'utilité sociale et écologique ou encore de responsabilité politique.

The Conversation

Antoine Bouzin est membre du Réseau Ingenium et de l'Observatoire des formations citoyennes.


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L'expérience étudiante a été profondément bouleversée par la crise sanitaire et les confinements successifs. Les pertes d'emplois, la continuité pédagogique à distance, la fermeture des lieux de socialisation et l'incertitude de l'avenir ont largement contribué à générer un climat anxiogène qui a eu des répercussions sur la santé mentale des jeunes. Ces multiples difficultés ont été largement relayées par les médias.

L'insécurité financière et sociale a rompu les sociabilités propres à la vie étudiante. Comprise comme « l'absence d'une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et aux familles d'assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux », elle est ici clairement établie, en raison du tarissement des ressources financières et de l'isolement social lié aux mesures restrictives.




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Or, cette insécurité, qui « peut être plus ou moins étendue et avoir des conséquences plus ou moins graves et définitives », tend vers les conséquences les plus dangereuses comme le renoncement aux soins, plus particulièrement dans les spécialités qui ne sont pas prises en charge en totalité par la sécurité sociale. C'est le cas de l'odontologie et des soins psychologiques et psychiatriques. Les psychiatres de secteur 1 – entièrement remboursés – se font rares et les psychologues ne sont pas pris en charge par les mutuelles.

La santé mentale est donc l'un des sacrifices faits sur l'autel de la précarité financière, ce qui n'est pas sans conséquence sur les trajectoires académiques.

À travers une étude quantitative et qualitative, menée d'avril 2020 jusqu'à la fin de l'automne 2020, nous entendons avoir un tableau précis des conséquences de la crise sanitaire sur la santé mentale des étudiants.

Une angoisse accrue par le premier confinement

Le premier confinement a rendu les étudiants inquiets par des conséquences d'une crise économique à court terme (58 % pensaient avoir des difficultés à trouver un job d'été, ce qui pénaliserait leur budget) et à moyen terme (57 % s'inquiètaient de la possible crise économique, surtout des étudiants salariés, les femmes et les étudiants en master).

Leurs peurs concernent également leurs études : 58 % s'interrogeaient sur leur possibilité de passer des examens du fait de la situation de confinement et 64 % s'alarmaient de leur chance de réussir ces partiels. Cette peur de l'échec est plus particulièrement perceptible chez les étudiants boursiers, les femmes et les étudiants en licence. L'arrêt des stages ou de l'alternance s'est avéré problématique pour près d'un étudiant sur deux. 45 % des étudiants étaient également préoccupés par la valeur de leurs diplômes. Enfin, plus de 50 % environ des étudiants se déclaraient inquiets pour leur famille, en ce qui concerne par exemple l'aspect financier ou la santé.




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À travers les résultats de l'enquête quantitative et des tests statistiques non paramétriques établissant des corrélations, nous pouvons voir des variations selon le milieu social, le genre et le cursus en cours. Ainsi les plus inquiets, que cela soit sur le plan académique, le diplôme ou la poursuite d'études, sont les femmes, les boursiers, les étudiants en licence mais aussi les étudiants salariés. Cette dernière sous-population est particulièrement concernée par ces différents éléments dans la mesure où l'équilibre entre poursuite d'études et finances est par nature instable et que la majorité de leur revenu pour financer leurs études provient d'un travail salarié avec un contrat de travail très souvent précaire.

Une année supplémentaire dans le supérieur, due notamment à un redoublement ou un refus pour entrer en master, entraîne une année supplémentaire de sacrifices. Or, les étudiants salariés sont déjà, en temps normal plus susceptibles de redoubler et de prolonger cette période de précarité dans la mesure où il existe un seuil de 15 heures de travail salarié hebdomadaire au-delà duquel les chances d'échouer ou de décrocher sont décuplées.

Covid-19 : comment la précarité frappe les étudiants (Le Monde, février 2021).

Concernant l'insertion professionnelle, les étudiants en master se distinguent des étudiants en licence, ce qui s'explique aisément par le fait que l'insertion professionnelle se fera pour eux dans un avenir proche (un ou deux ans) en raison des importantes incertitudes sur le « monde d'après » liées aux conséquences de la pandémie sur le marché du travail et sur l'économie. Les femmes et les étudiants salariés sont également concernés par cette inquiétude d'une potentielle crise économique. Ces sous-populations craignent que le diplôme ne protège plus du chômage et que le « sas d'attente », soit le temps entre la fin de la formation et l'obtention d'un emploi rémunéré à la hauteur de leurs qualifications, s'allonge considérablement.

Un fragile équilibre brisé par le confinement

Issus d'une classe moyenne inférieure, une partie des étudiants bénéficient d'une bourse à un faible échelon et d'une aide parentale minimale. Ils vivent dans une certaine fragilité qui s'est accrue depuis le début de la crise sanitaire. La majorité de cette classe travaillait pour subvenir à ses besoins et pouvoir finir le mois, mais la crise sanitaire et les confinements successifs leur ont fait perdre leur contrat déjà précaire. Tous essayent de faire preuve de résilience car les études supérieures sont pour eux un moyen d'avoir une situation meilleure que celle de leurs parents et gravir l'échelle sociale.

Ces étudiants font preuve de multiples stratégies de coping pour s'en sortir. En majorité, ils n'habitent plus chez leurs parents et comptent sur les aides publiques pour payer en grande partie le loyer. Les bourses et l'aide parentale servent aux autres dépenses contraintes, mais n'autorisent aucun plaisir. Ce manque de latitude financière les enlise dans un isolement social en les contraignant à rogner sur leur budget sorties. Une charge mentale s'installe et le temps à chercher un travail étudiant gagne du terrain sur le temps consacré aux études, ce qui provoque une grande anxiété et une déprime latente.

Quel impact a la crise sanitaire sur la santé mentale des étudiants ? (Brut, octobre 2020).

Tous les étudiants de cette classe déploraient le manque d'action du gouvernement pour soulager la détresse des étudiants et condamnaient l'invisibilisation dont ils sont victimes. Deux d'entre eux ont trouvé comme exutoire les réseaux sociaux où des centaines d'étudiants parlent de leurs conditions de vie et de leur vulnérabilité sous l'hashtag #etudiantsfantomes. Ils essayent ainsi de faire prendre conscience à l'opinion publique que leur situation se dégrade de plus en plus et que leur souffrance n'est plus gérable.

Un sentiment de révolte grandit chez la majorité de cette classe, après les tentatives de suicide des étudiants annoncées dans les médias. Ces restrictions leur donnent la force de se mobiliser et les réseaux sociaux leur ont permis de trouver un refuge de pair-aidance et d'écoute et de ne pas se sentir seuls face aux vulnérabilités.

Une absence de vie sociale étudiante difficile à vivre

Une seconde catégorie réunit des étudiants issus de classes moyennes supérieures ou aisées. Ils ont incorporé la nature précaire de la condition étudiante mais ont les capacités et les ressources sociales pour se projeter. La crise sanitaire a eu un effet plus psychologique que financier sur cette classe. L'image d'Épinal de l'étudiant insouciant prolongeant l'adolescence et les découvertes est esquintée dans la mesure où la vie sociale étudiante est devenue quasiment inexistante.

L'ensemble de cette classe connaît un sentiment envahissant d'isolement bien que ces étudiants aient des liens sociaux forts et un réseau de soutiens familiaux et amicaux. Ils veulent la réouverture des établissements d'enseignement supérieur car ils craignent de passer à côté de nouvelles relations – amicales ou amoureuses – et de connaissances importantes en raison de la fermeture des lieux où la vie sociale s'exerce.




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Le caractère incertain de l'avenir et le manque de vie sociale pèsent sur le moral de ces étudiants dans la mesure où ils ne comprennent pas pourquoi la jeunesse est sacrifiée pour une population à risques qui est relativement âgée. Une fracture générationnelle se crée alors avec une incompréhension des deux populations. Ils justifient aussi un « retour à la vie normale » par la détresse psychologique de certains étudiants.

Malgré la période incertaine, ces étudiants ont relativement confiance en l'avenir, même s'ils sont conscients qu'économiquement les prochaines années ne vont pas être faciles pour la majorité des jeunes diplômés. Par ailleurs, cette relative sérénité s'explique par leur trajectoire : cette classe d'étudiants n'a pas connu de situations de précarité pendant l'enfance. Ils ont une capacité d'adaptation importante car ils peuvent mobiliser pléthore de ressources disponibles dans leur entourage, comme la mobilisation de réseaux professionnels pour les protéger du chômage.

Un enlisement dans une détresse financière et psychologique

La dernière classe d'étudiants est celle qui a été la plus affectée par la crise sanitaire, amplifiant les inégalités de condition de vie et d'études que l'on observait déjà d'ordinaire. Elle réunit des étudiants privés d'un soutien familial et venant d'un milieu social soit populaire soit de classe moyenne inférieure.

L'éloignement géographique vis-à-vis de leur ville d'origine a amplifié l'isolement social provoqué par la crise sanitaire. Tous ont décidé de rester sur leur lieu d'études depuis le premier confinement, ne pouvant se permettre de perdre leur logement en raison de la grande tension du marché locatif dans les grandes villes étudiantes ou de payer un loyer sans y habiter. Cette décision a joué un rôle dans la dégradation de leur santé mentale.

Mêlée à une détresse psychologique, cette détresse financière plonge certains dans une situation de décrochage universitaire. Si ces étudiants n'ont pas de projet professionnel défini en comparaison à la deuxième classe, ils ont un espoir de vie meilleure grâce aux études supérieures dans la lignée du rêve de l'ascension sociale. De plus, l'ensemble de cette classe craint une situation de déclassement social accentuée par la crise sanitaire, ce qui nous ramène à l'enquête quantitative qui montrait que les plus précaires étaient les plus anxieux concernant une crise économique.

La crise de la Covid-19 fait bondir la précarité étudiante en France (France 24, novembre 2020).

Ils craignent de connaître une période de chômage de longue durée en raison de la conjoncture négative et d'avoir une situation pire que celle de leurs parents. Leur estime de soi a périclité avec la précarité grandissante, ils ne se sentent plus acteurs de leur vie et subissent un présent sans avenir en attendant des jours meilleurs. Cette impuissance peut également être liée aux inégalités d'informations concernant les dispositifs d'aide pour les étudiants puisqu'il faut avoir les ressources sociales pour trouver les organismes et associations qui peuvent porter assistance.

Ces étudiants connaissent également une charge mentale de la précarité plus importante que la première classe. Leurs pensées sont occupées par les questions financières, les angoisses du quotidien et une grande incertitude de leur avenir. La pauvreté réduit le temps consacré aux études : il faut se déplacer pour obtenir des aides, aller aux distributions alimentaires et subir de longues attentes pour attendre son tout faire plusieurs magasins pour économiser le plus d'argent possible, ne pas prendre les transports en commun parce qu'un ticket coûte plus qu'un repas, etc.




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Le coping prend forme dans plusieurs stratégies pour faire face à la précarité : « Pour économiser je dors jusqu'à 14h pour sauter le petit-déj' et le déjeuner, j'essaye de manger qu'en fin d'après-midi c'est vraiment dur je le souhaite à personne de passer la journée le ventre vide. […] C'est dur d'étudier dans ces conditions » ; « Les midis je mange du pain et bois du café c'est pas cher et ça cale quelques heures ».

Ces résultats montrent que les étudiants ont vécu des situations de confinement variées. Les inégalités que l'on constatait avant le confinement se sont accentuées durant cette période. Les conditions de vie se sont détériorées pour les étudiants qui étaient initialement les plus précaires. Ils indiquent également les risques qui pèsent sur eux dans l'avenir, si la crise sanitaire se prolonge par une crise économique durable. Si certains étudiants interrogés vivent la crise sanitaire avec une certaine résilience sans affecter de manière importante leurs études, les confinements ont souvent eu une incidence directe sur leurs conditions de vie qui se sont dégradées, par exemple une perte de revenus ou des conséquences psychologiques.

The Conversation

Kenza EL HADJ SAID a reçu des financements de la Ville de Paris.


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En ouvrant les Chemins de la coopération en juillet 2020, la Ville de Brest et ses partenaires ont souhaité poursuivre la dynamique de coopération et de partage du Forum des usages coopératifs initialement prévu à cette date.


A l'été 2021, le thème de la convergence des transitions étant particulièrement d'actualité et porteur de solutions dans le contexte sanitaire qui perdure, le Comité d'organisation du Forum crée un événement en ligne pendant la période du 28 juin au 6 juillet 2021 : "Les chemins de la coopération 2021" :

Avec une web conférence le 1er juillet - 10h d'Ariel Kyrou et une conférence le 30 juin à 18h à l'auditorium de la médiathèque des Capucins à Brest "Pourquoi et comment la science-fiction peut-elle aider à une transition de société ?".
Son ouvrage "Dans les imaginaires du futur ", prend "au sérieux" les sources de fiction et les mêle à des réflexions philosophiques un a priori affiché pour une "utopie anarchiste et terrestre".
La science-fiction propose des horizons et des pistes de chemin pour des futurs alternatifs (nous débloquer grâce aux imaginaires, nous redonner le goût du temps et l'envie de "faire", la nécessité de "prototypes" du futur entre utopie et dystopie, etc.)


Ariel Kyrou

Des rendez-vous pour chacun des 7 chemins vont être proposés en visio : coopérations ouvertes pour la santé, l'éducation, les lowtech, l'inclusion sociale et numérique, les Fabcities, les circuits courts et l'autonomie alimentaire, le climat et la biodiversité

Programmation

Lowtech et transitions

Coordination : Hugues Aubin, Ville de Rennes, Rennes métropole

Jeudi 1er Juillet - 14h00-15h30
La déferlante low tech

Changement climatique, écologie, résilience et communs : partage d'enjeux et d'actions entre low-tech, réparation et éco-conception
Introduction J.Jouzel, climatologue, GIEC "Quel intérêt des low tech dans le cadre du réchauffement climatique"

  • L'aventure du low tech lab avec Clément Chabot
  • Zoom sur le low tech lab, le solar sun trip, californouaille, low tech skol
  • Fablabs, low tech et pédagogie : avec le Senfablab dans le quartier du Grand Yoff à Dakar - Mouhamadou Ngom - Senfablab.
  • La conception en économie circulaire face aux low tech : Comment envisager répondre à des besoins par des objets co-conçus, frugaux, mais productibles en série ?
    3 exemples récents et une méthodologie par Yves Quéré, responsable de l'Open Factory Université de Bretagne Occidentale.
  • Echange/débat.

Fabcities, Villes résilientes

Coordination : Romain Chefdor Rennes Métropole et Yves Quéré UBO Open Factory (et toute une équipe)

mercredi 30 juin - 14h00-16h30
Fabcities

14h - 15h : Table ronde : présentation des modèles et des projets sur les territoires et des structuration.
Intervention de Brest, de Rennes, d'AURA et de Toulouse-Occitanie.
Modération N. Friant (référent régional FabLabs )

15h - 16h : Atelier
Animation par FabCity Brest et FabCity Rennes
Tour de table sous la forme de Pecha Cucha
Intervention de :

  • CNAM ;
  • RESET ;
  • Sensor.community ;
  • FabCitizen …
  • Présentation Sense Océan (capteurs eau) Hack2eau (Rennes)
  • Food Brest (Alimentation) & Mad@Brest (lien sur Rennes et Brest)
  • Data Terra (lien vers les indicateurs / éthique de la data et prospectif)
    Cet atelier sera sous la forme de contributions communes pour aboutir à un appel à projets, à une feuille de route sur les datas environnementales entre les acteurs.
    Angle de présentation : Genèse du projet sous 4 axes :
    1 - Production de données (Sense Océan, Sensor.Community …)
    2 - Coalition autour de la donnée
    3 - Ouverture de la donnée
    4 - Indicateurs
    Organisation d'un évènement fin 2021 autour de la donnée : quels souhaits des acteurs.

Enseigner les transitions et en transition

Coordination : Michel Briand, Jean Marie Gilliot Telecom Bretagne,

le 30 juin à 16h : La Rentrée du climat
Un second webinaire du groupe créé à l'initiative de Riposte Créative Pédagogique .

au programme
Présentation de la dynamique de coopération ouverte
La Rentrée du climat avec Hakara Tea

Ce webinaire présentera l'initiative de la Rentrée du climat qui vise à déployer massivement des ateliers sur la Fresque du climat cet automne et de contribuer ainsi à sensibiliser des milliers d'étudiants et d'enseignants.

  • Pour vous inscrire et obtenir le lien par retour de mél, merci de répondre à ce court formulaire en cliquant ici
  • Pour participer au groupe "Transition écologique en coopération ouverte dans l'enseignement supérieur francophone", s'inscrire sur la liste sympa

Un groupe pour croiser les initiatives, mutualiser les ressources et favoriser la prise en compte de la transition écologique (climat, biodiversité, raréfaction des ressources, numérique responsable, résilience .. ) dans l'enseignement supérieur francophone et la formation des adultes. Face à une crise qui touche à l'existence même de la société humaine sur terre, nous faisons ici le choix d'une démarche en coopération ouverte à toutes et tous. L'urgence de la crise justifie à nos yeux une coopération ouverte(pour un monde vivable et désirable qui privilégie les productions et contenus réutilisables (telles celles sous licences creative commons) et répondre aux questions :

  • Quelles transformations des contenus enseignés ?
  • Quelles formes pédagogiques qui impliquent les étudiants et relient au territoire ?
  • Quels enseignements spécifiques ?
  • Quelles implications des étudiants ? comment les favoriser ?
  • Quelles ressources éducatives libres ?
  • Quels retours d'expériences, bilans, analyses ?

au programme
Présentation de la dynamique de coopération ouverte

  • le Master en humanités environnementales université de Nantes
  • et sous réserve la Rentrée du climat par la Fresque du climat

Transitions & inclusions sociale et numérique

Coordination : Élisabeth Le Faucheur, Brest métropole et ville

2 temps : un temps de présentation d'étude et de projets inspirants -Jeudi 1er juillet, 14h - et un temps d'atelier en mode intelligence collective -Vendredi 2 juillet, 14h.

Jeudi 1er juillet - 14h-15h30
Accès aux droits & inclusion numérique : de l'urgence à se coordonner à la nécessité d'une approche stratégique collective

En mode Pitch !

Accueil des participants
Introduction

  • Enquête Capuni crise : « Focus sur les éloignés du numérique » Géraldine Guérillot, Gis Marsouin -
  • Présentation de la dernière étude LabAcces :
    « Lieux et acteurs de la médiation numérique : quels impacts des demandes d'aides e-administrative sur l'offre et les pratiques de médiation ? »
    Cette étude, issue d'observations et d'entretiens menés dans des lieux de Médiations numériques, montre l'impact de la dématérialisation sur les actions des médiateurs numérique, le paradoxe entre l'ambition capacitante de la médiation et la réalité d'espaces numériques utilisés comme des guichets pour l'e-administration, dans un transfert de charge des missions d'accompagnement des usagers des administrations aux acteurs de la « Médiation numérique », sans enrôlement formel clair et explicite de la part des organismes dématérialisant. Il interroge aussi la nécessaire définition des segments d'offres des médiations utiles pour l'accès aux droits, et qu'il conviendrai d'analyser et de définir plus précisément.
    Benoît Vallauri, Ti Lab, LabAccès
  • "Brest, le chantier métropolitain « Inclusion numérique et accès aux droits », le choix de coopérer et de s'outiller pour se coordonner"
    Initié en 2019 le chantier métropolitain réunit collectivités, opérateurs, acteurs associatifs… agissant dans le champ du numérique, du social, dans le culturel, ou le socioculturel. Pour développer une culture commune et la mise en réseau, la stratégie s'appuie sur une formation territoriale mais aussi la conduite d'un état des lieux des pratiques des habitants, et de l'offre d'accompagnement en matière d'accès aux droits et d'inclusion numérique. Cet état des lieux est enrichi par l'approche du LabAccès et la déclinaison sur Brest métropole du PorTREA (Portrait territorialisé de la Relation E-Administrative).
    Élisabeth Le Faucheur, Brest métropole et ville - Hélène Trellu, Conseil Départemental du Finistère - Benoit Vallauri, Ti Lab, LabAccès
  • « Numérique responsable : quelle place donnée à l'Inclusion numérique ? »
    Hervé LeLuherne , Région Bretagne
  • Place aux questions
  • Présentation de la session du vendredi 2 et appel à candidats
    La séance du vendredi laisse place aux porteurs et porteuses de projets qui souhaitent faire appel à l'intelligence collective pour bénéficier de retours sur leurs expériences, de pistes d'évolution, d'idées. En fin de séance le jeudi, une présentation de l'organisation du vendredi sera réalisée.
    Si d'ores et déjà, vous souhaitez soumettre votre projet à des regards nouveaux, vous pouvez vous inscrire en complétant ce formulaire .

Vendredi 2 juillet - 14h-15h30
Atelier : Accès aux droits, inclusion numérique et intelligence collective

Cet atelier propose un temps d'intelligence collective aux porteurs et porteuses de projet qui souhaitent présenter leurs projets, leurs questions et recueillir des retours, des idées pour une mise en perspective d'évolution, de solutions...
En pratique : pour proposer un sujet, un projet, il suffit de compléter le formulaire ci-joint .
Réunit en plénière dans un premier temps, la salle de visio se divisera en sous-groupe auto-organisés autour des différents projets identifiés.

Vers une santé ouverte

Coordination : Hugues Aubin, Ville de Rennes, Rennes métropole

Vendredi 2 juillet - 14h00-15h30
Open santé : vers des communs opérants

Comment créer de boucles libérant le potentiel des biens communs numériques dans le registre de la santé au sens large ? Revue de projets pilotes et débat en France et à l'international.

  • La rencontre des mondes : la ferme d'impression 3D de l'APHP et le projet covid 3d. Philippe Cochin AP-HP - Phillppe Cochin- COVID3D APHP : Impression 3D pour la crise COVID
  • Articuler bien communs numériques, entreprises et lieux de soins : Y.Quere/Erwan Lehr - CHU de Brest/UBO.
  • Tirer des enseignements de crise pour travailler sur la durée : projet pilote d'open santé du Réseau Français des fablabs avec le CHU de Montpellier. Mentzo de Winter, administrateur du Réseau Français des Fablabs et président du Labsud.
  • Coopération internationale : le projet Makers Nord Sud - Medard Agbayazon, président du Réseau des Fablabs francophones d'Afrique de l'Ouest. http://www.makersnordsud.org
  • Echange/débat

Climat et biodiversité

Coordination Jacques François Marchandise FING et Louis Julien de La Bouere

Jeudi 1er juillet - 17h - 18h30
Climat et biodiversité : les données au service des projets collectifs et territoriaux

Animation : JF marchandise, M Brient (FING) et LJ de la Bouëre (Tiriad) ,en attente l'agence bretonne de la biodiversité
Socialisation des données et biodiversité :

  • Comment les associations locales peuvent se saisir/se saisissent des données environnementales pour orienter leurs actions ? associations qualité de vie, mobilités etc...
  • Comment relier données environnementales et pédagogie ?
  • place des données environnementales, notamment biodiversité, dans les programmes de SVT, Histoire Géo
  • Comment un territoire peut ou se saisit des données biodiversité pour appuyer sa politique de transition écologique ?

Circuits courts et autonomie alimentaire

Coordination : Mélanie Siche Conseil départemental 29

Vendredi 2 juillet - 10h30 - 12h30
Atelier transnational FR - UK - Table-ronde sur la précarité alimentaire dans le cadre du projet EU INTERREG C-CARE

Mot d'accueil, objectif de l'atelier (partager des constats, des initiatives et des difficultés en matière de lutte contre le précarité alimentaire)

  • Les chèques alimentaires/cartes de paiement (quelles modalités, pourquoi, points forts de ce mode de fonctionnement et faiblesses) / côté UK témoignage sur aide alimentaire aux enfants (free school meal, chèques alimentaires)
  • Présentation d'une épicerie sociale / côté UK témoignage d'une Banque alimentaire (food bank)
  • Témoignage de la CRESS (étude en cours) pour parler de la coordination des acteurs
  • Conclusion et ouverture sur l'accompagnement des publics précaires (formation travailleurs sociaux et bénévoles d'associations)

La participation à ces événements est sur inscription. (formulaire à venir)

Les Chemins de la coopération c'est aussi un site ouvert où se croisent initiatives, acteurs et ressources, pour témoigner des dynamiques de réseaux, capitaliser des ressources et se créer collectivement une base d'acteurs et de contenus pour le Forum des usages coopératifs attendu en 2022.

http://forum-usages-cooperatifs.net/


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